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Le gaz naturel va connaître son âge d’or, estime l’Agence internationale de l’énergie dans son rapport publié hier. Bon marché et abondant, ce combustible risque de remettre en cause le développement du nucléaire et des énergies renouvelables.

Le gaz naturel a de beaux jours devant lui. C’est le seul combustible fossile dont la demande va dépasser en 2035 celle de 2008, et ce dans tous les scénarios, estime l’Agence internationale de l’énergie (AIE), dans son rapport annuel publié hier. La demande mondiale de gaz, qui a reculé en 2009 pour la première fois depuis quarante ans, devrait même repartir à la hausse cette année, avec une croissance de 2 %. Le gaz est appelé à jouer « un rôle essentiel pour répondre aux besoins énergétiques mondiaux pendant au moins les deux décennies et demie à venir », martèle l’AIE.

Dans son scénario principal, celle-ci estime que la consommation de gaz va bondir de 44 % entre 2008 et 2035. A cette échéance, ce combustible pourrait peser presque autant que le charbon dans la production énergétique mondiale. Il devrait en effet bénéficier d’une forte demande de la Chine, avec une croissance moyenne de presque 6 % par an d’ici à 2035.

Cette hausse pourrait être encore plus rapide si l’utilisation du charbon est limitée par des facteurs environnementaux. Pour Fatih Birol, l’économiste en chef de l’Agence, le gaz pourrait ainsi connaître « un âge d’or très bientôt ».

Plus propre que le pétrole ou le charbon, le gaz va en effet rester une énergie bon marché dans les années à venir, du fait de la surabondance de l’offre et de l’essor des gaz non conventionnels (gaz de schiste, gaz de houille et réservoirs compacts). En plein boom, ceux-ci devraient assurer plus du tiers de la hausse de la production de gaz de la planète d’ici à 2035.

Petits acteurs indépendants

Cette révolution du gaz non conventionnel, les grands groupes énergétiques ne l’ont pas vue venir, alors même qu’elle remet en cause l’équation énergétique mondiale. Sous la houlette de petits acteurs indépendants, ce type de gaz a connu un développement fulgurant outre-Atlantique pour représenter plus de la moitié des volumes extraits du sous-sol américain. A lui seul, le gaz de schiste a généré 20 % de la production en 2009, contre 1 % en 2000, selon le Cera.

Cette montée en puissance a non seulement bouleversé le marché du gaz, mais aussi remis en question la compétitivité des autres énergies. Aux Etats-Unis, le nucléaire fait partie des secteurs touchés au premier chef. « La renaissance du nucléaire, qui semblait imminente en 2007, a été repoussée du fait des faibles prix du gaz naturel et de la crise du crédit », estime Standard & Poor’s dans une étude récente. De quoi remettre en question des investissements lourds dans le nucléaire, alors même qu’il ne coûte rien d’émettre du carbone, que le lobby américain du charbon est puissant et qu’il est difficile d’obtenir une garantie de prêt de l’État pour construire une centrale. EDF vient d’en faire l’amère expérience, avec la décision de son partenaire américain Constellation Energy de renoncer à ses projets nucléaires.

Autre secteur touché, les énergies renouvelables. La baisse des prix spot du gaz s’est propagée au marché de l’électricité, du fait de la crise et de la baisse des coûts de fonctionnement des centrales au gaz. Du coup, l’éolien et le solaire ont perdu en compétitivité. « Dans un monde où le gaz est bon marché et relativement propre, qui va investir dans les installations de production les plus onéreuses ? » s’interroge le professeur Paul Stevens, de l’Institut royal des affaires internationales.

Les Échos

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