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La ministre en charge de l’enseignement professionnel, Carole Grandjean, a déclaré que«16% des bacs pro ont des difficultés de lecture et d’écriture». Un paradoxe, alors que de plus en plus d’élèves obtiennent leur diplôme. En 1995, soit dix ans après la création de la filière, le bac pro affichait un taux de réussite de 72,7%. En 2022, il était passé à 82,2 %. Comment en est-on arrivé là?

[…] Pour Claude Lelièvre, historien de l’éducation, les jeunes qui se destinaient à un métier manuel n’ont pas toujours été de mauvais élèves. De 1959 à 1975, les collèges d’enseignement technique sont «des filières d’élite ouvrière, qui recrutaient de très bons élèves de milieux populaires», indique l’historien. Par la suite, les bacs généraux recrutent plus largement, et les bacs technologiques apparaissent. Et en 1985, le bac professionnel est créé. Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Éducation nationale et Laurent Fabius, premier ministre, veulent rapidement former des ouvriers ou employés du secteur tertiaire. À l’inverse du bac général ou technologique, les diplômés du bac pro doivent pouvoir directement entrer sur le marché du travail, sans nécessairement entreprendre une poursuite d’études. «Le nombre d’élèves de bac pro entrant à l’université se faisait au compte-goutte», précise Claude Lelièvre.

Pour Alain Bentolila, professeur à l’université Paris-Descartes et auteur d’une vingtaine d’ouvrages concernant notamment l’illettrisme : «Les voies professionnelles sont donc devenues des dépotoirs de l’Éducation nationale.» Et ça se voit: le service statistique du ministère de l’Éducation nationale, la Deep, a publié un rapport en novembre dernier mentionnant qu’en français, 40% des élèves de 2nde professionnelle ont une maîtrise insuffisante ou fragile. En maths, ce taux s’élève à 69%.

Il ajoute : «À leur rentrée en CP, 20% des enfants ne connaissent que 300 mots. Il y a aussi 20% d’élèves qui connaissent plus de 2500 mots. La différence est énorme. Or, quand on apprend à lire et que l’on connaît peu de mots, on apprend mal. Car l’enfant apprend à déchiffrer des mots qui lui sont familiers. Et quand on ne sait pas lire un texte, on ne peut pas non plus lire un problème de mathématiques», résume Alain Bentolila. […]

Le Figaro

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