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Spécialiste des médias et professeure d’économie à Sciences-po, Julia Cagé analyse le rôle joué par les réseaux sociaux dans l’élection américaine et la manière dont ils ont fracturé le pays. Autrice récente de Libres et égaux en voix, une réflexion sur la fatigue de la démocratie, la chercheuse s’interroge sur le refus des différences dans le débat politique et l’impossibilité croissante, dans les régimes représentatifs, de maintenir une délibération politique apaisée. Un avertissement pour la France, dit-elle.

Quelles sont vos premières impressions à l’issue de cette élection ?

Ce qui me frappe, c’est le degré de polarisation entre les deux camps jamais vu à l’occasion de cette élection. Elle est bien plus forte qu’il y a quatre ans, et tous ceux qui prédisaient une vague bleue en ont été pour leurs frais. On a assisté à une sorte d’aveuglement d’une partie de la presse libérale outre-Atlantique et des médias français selon lesquels la gestion calamiteuse de l’épidémie par l’administration Trump et le retournement de l’économie allaient le renvoyer aux oubliettes de l’histoire. Or s’il a bien perdu l’élection avec de surcroît un vote populaire qui devrait dépasser les quatre millions de voix d’écart en faveur de Biden, le trumpisme n’apparaît absolument pas pour autant en perte de vitesse. La participation a nettement augmenté mais l’Amérique apparaît plus divisée et polarisée que jamais et c’est une très mauvaise nouvelle pour la démocratie.  […]

Les démocrates ont contribué à cette polarisation. Le parti repose de plus en plus sur les grands donateurs privés et s’est coupé des classes populaires. Biden a reçu davantage de dons de la part de ceux qui ont un revenu médian annuel supérieur à 100 000 dollars tandis que Trump a drainé des financements chez des ménages plus modestes. Cela se retrouve dans la structure de l’électorat de Biden. Le désamour entre les classes populaires et le Parti démocrate vient aussi de ce mode de financement. […]

msn/Libération

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