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Algériens, portugais, kabyles ou juifs, les clubs de foot communautaires deviennent «ordinaires» selon le Monde.

Sur le terrain synthétique éclairé par les grands projecteurs, un petit groupe de joueurs adultes s’échauffe en rigolant. Les bavardages font entendre les frottements chuintants particuliers du ­tamazight – le berbère. Mis à part ces ­accents exotiques, rien ne distingue l’équipe du Football club berbère, qui joue après les heures de bureau au stade Bernard-Lama à Villetaneuse ­(Seine-Saint-Denis) ce vendredi soir d’automne. Leurs maillots jaune et vert, siglés d’un écusson zébré d’un « Z » touareg, sont au lavage avant le match de dimanche. […]

Ces clubs dits communautaires sont légion en région parisienne et autour des métropoles régionales. Depuis une dizaine d’années, ils sont même nombreux à se créer, selon les instances du football, sans que l’on ait de chiffres précis. Certains y viennent par la famille, d’autres par le biais d’amis, d’autres encore à cause de la réputation du club. Pour se retrouver entre adultes de la même origine, du même pays, parfois du même village. On y inscrit ses ­enfants et on essaie ainsi de leur transmettre ce qu’on pense important de ses racines, de sa culture. […]

Ces clubs sont nombreux à la FSGT et font partie de l’histoire de la fédération ouvrière fondée par la CGT. «Retrouver ses racines, c’est un mode de fonctionnement normal. On accueille tout le monde. On a des clubs communautaires “régionaux”,des Auvergnats, des Bretons», note Dominique Chazal, membre du bureau du comité de Paris. «On s’est enrichis avec les différentes communautés migrantes. Ces clubs sont un peu l’ADN de notre fédération. On voit ainsi toutes les couches de la société », insiste Mourad Mazouzi, membre du comité directeur. […]

Les crispations identitaires de ces derniers mois dans la société française ont pourtant jeté une drôle de lumière sur ces clubs amateurs. Dans l’ambiance post-attentats tendue, ces équipes ont soudain été regardées avec suspicion. En brandissant avec fierté leurs origines, ces joueurs ne mettraient-ils pas à mal la ­cohésion républicaine ? Ne pourraient-ils pas être le terreau de revendications plus radicales ? […]

La présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, a ainsi promis durant sa campagne de faire adopter une charte de la laïcité pour lutter contre le prosélytisme religieux dans les vestiaires. […]

«On ­observe avec assez d’inquiétude ce projet de charte, comme si on voulait inciter à une forme de délation. On est certes à un moment difficile pour la France mais il faut rester vigilant quant à nos libertés», défend M. Mazouzi, à la FSGT. Même ­réserve du côté de la FFF, qui a amendé, fin mai, le premier article de ses statuts, interdisant «tout acte de prosélytisme ou manœuvre de propagande ».

«Quand un club s’affilie à notre fédération, il respecte nos statuts et les valeurs du sport. Faire signer un deuxième document spécifique sur la laïcité, ça peut laisser place à une stigmatisation de certaines équipes, et ce n’est pas le moment dans le climat anxiogène que nous ­connaissons», note M. Matthieu Robert, chef de projet à la LFA. Ajoutant : «Les mélanges, c’est ça le foot aujourd’hui».

Le Monde

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