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11/09/2016

Le nouveau roman du parolier et chanteur de Zebda Magyd Cherfi “Ma part de Gaulois”, qui retrace son parcours d’enfant des quartiers nord de Toulouse, a été retenu dans la 1ère sélection de 16 romans pour le Goncourt 2016. […]

Je suis sur le cul. C’est magnifique. C’est un petit plaisir rare” : ce sont les premiers mots qui sont venus à Magyd Cherfi lorsqu’il a appris mardi dans l’après-midi que son nouveau roman “Ma part de Gaulois” était retenu dans la première sélection de 16 romans en lice pour le plus prestigieux prix littéraire du monde francophone. 

Le chanteur et parolier de Zebda n’a alors pas immédiatement pensé aux siens, mais “à l’équipe d’Actes sud qui défend ce bouquin et qui me défend depuis le début en me disant : Magyd, il y a des écrivains et il y a toi”. “Comme si, explique Magyd Cherfi, j’étais une sorte de supplément en tant qu’homme, en tant que citoyen et porteur d’idées. C’est un vrai baume au cœur. Je le sens“. […]

“Ma part de Gaulois” raconte l’année du baccalauréat du petit Beur du quartier toulousain des Izards. Ce bac, qui est une formalité pour les Français. Mais un événement pour l’“indigène” Magyd, fils d’immigrés kabiles analphabètes. En décrochant le premier bac arabe de la cité, il devient aussi celui qu’on regarde désormais comme l’homme qui marche sur la lune.

France3


Magyd Cherfi, fils de kabyle qui a grandi dans une cité du nord de Toulouse, vient de sortir son dernier livre : “Ma part de Gaulois“. “Les Blancs sont instruits. Nous, on est dans le dur“, dit-il. “Puisqu’on n’a pas les codes, puisqu’on n’est pas Français, puisqu’on n’est pas blancs et que les Français ne nous veulent pas, ils vont vaincre, mais au moins on va leur péter les dents. On a perdu d’avance, mais on va faire des dégâts“, résume-t-il à propos de la mentalité du quartier où il a grandi.

Pour l’écrivain, “au fond, ce que la France a oublié, c’est qu’on naît français et c’est qu’au fil des vicissitudes et des discriminations qu’on le devient de moins en moins. Dans “Ma part de Gaulois”, c’est un peu ce que j’ai voulu dire. À quoi ça sert d’aller arborer des arguments républicains si la République ne veut pas de vous ?


08/09/2016

Le roman de Magyd Cherfi , chanteur du groupe Zebda, “Ma part de Gaulois”, qui retrace son enfance dans les quartiers nord de Toulouse, est retenu dans la première sélection pour le Goncourt 2016.

Dans une écriture pressée, mais non hâtive, il y raconte sa vie de fils d’immigré algérien dans un quartier de Toulouse. […]

La phrase en exergue de votre livre est « l’exception française, c’est d’être français et de devoir le devenir ». Comment devient-on français, et surtout « comment peut-on être français » ?

Je pense que c’est une lubie derrière laquelle courent les « Français » eux-mêmes, et nous, issus de l’immigration, nous courons derrière eux à notre tour. J’ai été français, mais la conscience politique, la guerre d’Algérie, le fait d’être fils de combattant du FLN m’ont amené à me « défranciser ». Mais pour cela il fallait partir du postulat que j’étais déjà français. Mais je n’ai jamais été considéré comme tel. Je pense pourtant avoir été plus français que de nombreux amis, car, très tôt, j’ai adhéré à la littérature. Pourtant, il me semble que nous le sommes plus que certains, car nous voulons l’être.

Seulement, nous n’avons pas les bonnes accréditations. Il faut savoir aussi ce qu’est être français ? Je n’ai pas la réponse, mais la question est posée. Je voudrais y voir une identité multiple, qui ne doit pas se résumer à deux mille ans d’histoire judéo-chrétienne, à la couleur de la peau. Il faut un autre récit, une identification cosmopolite avec de nouveaux symboles.

La France est-elle prête ?

Absolument pas. Les freins sont multiples. Je prends l’exemple de la gauche. Elle a eu peur. Elle voulait bien de nous, les « Beurs », mais seulement d’un point de vue théorique, car cela correspondait bien à son schéma théorique universel. Mais la réalité, électorale notamment, la poussait à n’agir qu’à tâtons. Ce « à tâtons » a tout cassé et nous a éreintés ces trente dernières années. Ce n’est pas un « non » définitif qui a fait du mal, mais ce fameux argument qui pose qu’« il faut du temps ». La peur de faire sauter le socle de l’histoire, le fait qu’il faille aussi des « Mohamed » dans les stèles, tout cela ne passe pas. Puis-je aimer l’Algérie et être français au-delà de tout ? Puis-je venir avec ma part de subversion et être français ? […]

Comment jugez-vous les débats actuels sur l’identité ?

 

La France a peur (rires). Ils sont terrorisés, car le socle identitaire et culturel bouge. Oui, il faut s’y faire, il va y avoir des musulmans partout, et ce n’est pas pour autant qu’ils seront moins français et moins patriotes.

Nos parents sont depuis plus de soixante ans en France, et pourtant on hésite encore à leur donner le droit de vote. J’envisage le pire pour 2017, je ne vois aucun courage politique, que ce soit à gauche ou à droite. Je continue à penser que la seule idée qui vaille, c’est l’universel. Mais qui le définit, c’est toute la question. Je ne sais pas plus parfois moi-même. Car on a fait de cet universel, tout et son contraire…

Le Point

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