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Par Saad Khiari, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), Paris.

A Gennevilliers, le maire a probablement fait une lecture particulière du principe de précaution, à l’idée que sa responsabilité serait engagée au moindre incident durant le ramadan.

La clause contractuelle obligeant les moniteurs de colonies de vacances à “se restaurer et à s’hydrater convenablement” pour prévenir toute défaillance due à l’état de jeûne aurait pu passer pour une maladresse d’un édile pointilleux qui aurait ignoré le calendrier. Or, et c’est là où l’on peut commencer à comprendre l’indignation quasi générale, cette clause visait sans aucun doute des employés de confession musulmane et donc jeûneurs potentiels, et devient dès lors abusive puisqu’elle introduit dans un contrat de travail des obligations contraires à la liberté du culte.

Sauf à considérer que jeûner “trouble l’ordre public établi par la loi” (article X de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen), auquel cas il faudrait introduire une batterie de codicilles pour les adeptes des régimes amaigrissants et pour ceux qui ne déjeunent jamais le matin. Sans compter qu’il faudrait mettre au point un système auquel seraient soumises toutes les personnes exerçant un métier à risques (pilotes, conducteurs de trains, aiguilleurs du ciel, ouvriers du bâtiment, chirurgiens…) : une sorte de “nutritest” dans lequel il faudrait souffler pour obtenir des indications précises sur le nombre de calories ingérées ainsi que sur l’équilibre nutritionnel des aliments consommés.

Sans doute le maire n’avait pas pensé qu’en imposant une telle disposition, il allait se retrouver devant un cas de discrimination à l’embauche.

[…] Cette obligation rituelle, qui prescrit le jeûne du lever au coucher du soleil, serait-elle rigoureuse au point qu’elle ne souffrirait d’aucun aménagement qui la rendrait moins contraignante ? La réponse est non ! “Pas de contrainte en religion” prescrit le Coran (II/256). Elle est on ne peut plus claire : ne pas contraindre les autres et ne pas se contraindre soi-même ; laisser en quelque sorte la raison dialoguer avec la foi. “Ne prenez pas le risque de mettre votre corps en danger” (II/195). […]

Le Monde

(Merci à Feeding Mars)

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