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Devant le désarroi des responsables politiques et des experts en économie face à la crise de la zone euro, une approche simplement comptable de la situation a quelques chances de se révéler constructive. Pourquoi ne pas l’envisager ?

La crise de la dette prend des proportions pour le moins préoccupantes. On a beau rappeler que le situation des États plus ou moins Unis d’Europe est plutôt meilleure que celle des USA, dont chaque État porte une dette faramineuse et où, de surcroît, l’État fédéral est lui-même débiteur de plus de 14 mille milliards de dollars, la défaillance annoncée de la Grèce, un pays qui ne représente pourtant que 2% du PIB européen, fait craindre le pire, parce qu’elle peut à elle seule briser ce qui reste de confiance, donc de fiducia, au point d’emporter le fiduciaire.

Parmi tous les scénarios de sortie de crise construits dans l’urgence ou évoqués par les dirigeants comme par les analystes, il en est un qui me semble, au point où nous en sommes, mériter d’être envisagé et regardé de près . Il s’agit tout simplement de l’abandon de créances croisées entre les différents acteurs de la zone Euro.

Certes on ne peut pas compenser directement les créances que détient l’Italie sur la France par celles de la France sur l’Italie, puisque l’État français est débiteur des banques, assurances et fonds de pensions italiens, et réciproquement.

Mais on sait que la dette des États souverains de la zone euro est détenue en moyenne à environ 53 % par des non-résidents alors qu’elle l’est à seulement 30% pour les USA et la Grande Bretagne et à 10 % pour le Japon. Cette moyenne européenne recouvre d’importantes disparités, les cas de la France (avec 3 principaux créanciers qui sont la Grande Bretagne, le Luxembourg et… les Îles Caïman) et de la Grèce, dont les dettes sont détenues à 70 % par des non-résidents étant a priori un peu plus compliqués que ceux de L’Allemagne (53% soit la moyenne européenne), de l’Espagne (44%) ou de l’Italie (45%). Il n’en reste pas moins que la part hors zone Euro de l’endettement de l’ensemble des pays Européens est estimée à seulement 30 %.

Si le projet politique de construction d’une Europe solidaire a une occasion de prendre corps, c’est peut être dans les jours qui viennent, et sur un terrain financier, voire comptable.

Imaginons qu’une instance européenne (la BCE ?) prenne, pour une courte durée (une semaine ou un mois) sous tutelle (location-gérance ?) l’ensemble des Établissements du secteur financier domestique qui détiennent des créances significatives sur au moins un État membre. Imaginons que, telle une holding restructurant ses filiales, ce tuteur procède autoritairement à la compensation des créances croisées (États inclus), à l’annulation des CDS dont le propriétaire ne détiendrait pas les sous-jaçants et à la recapitalisation de ceux parmi les Établissements concernés qui se trouveraient dangereusement désavantagés par ces jeux d’écritures.

Resterait alors, avant de rendre les clés aux propriétaires de ces Etablissements, à construire et à imposer un Glass-Steagall Act à l’Européenne, à vérifier la légitimité, notamment du point de vue fiscal, des créances résiduelles détenues par des acteurs domiciliés hors zone Euro, et à fiscaliser les créations de produits dérivés, comme indiqué par exemple dans l’essai intitulé « Je ne suis pas candidat, mais j’ai un programme » qui vient de paraître aux Éditions Ivoire-clair.

Trop simple ? Sûrement ! Mais au point où nous en sommes, et compte tenu de ce que laissent augurer les scénarios qui tiennent actuellement la corde, une approche naïvement comptable de mécanismes financiers tellement sophistiqués qu’ils nous échappent pourrait s’avérer très utile.

Les Échos

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