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Salle des fêtes de l’Elysée, 16 décembre 2022. Emmanuel Macron cherche une bouffée d’air frais. Il lui faut des idées neuves pour affronter un pays éruptif à même de verser dans le populisme. Le chef de l’Etat a réclamé une réunion de ­cabinet très spéciale : 80 conseillers sont assis autour d’une table en fer à cheval, où pintade et vin sont servis. Tous, y compris les petites mains qui n’approchent ­jamais le président de la République, ont été sommés de plancher sur le thème : quelle France laisser en 2027 ? Une première. Très vite, le conciliabule se mue en réflexion pour contrer l’ascension de Marine Le Pen. « N’ayez pas peur du Rassemblement national [RN], enjoint Emmanuel Macron. C’est quand on a peur que ça arrive ! » Les idées fusent : abaisser la majorité à 16 ans ? Légaliser le cannabis ? Créer une carte Vitale écologique ? Le chef de l’Etat écoute, ravi, valorise l’audace en dépit des ricanements échangés sous cape. « D’autres avis ? Une opinion dissidente ? », mitraille-t-il en réclamant à ses collaborateurs de la « radicalité ».

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Manquerait-il un Jean Castex au président ? L’ex-premier ministre, ancien maire de Prades (Pyrénées-Orientales), célébrait dans son discours de politique générale, en juillet 2020, la « France du bon sens », livrant une étonnante ode aux « gens » en phase avec l’électorat RN. Le locataire de Matignon aux quelque 350 déplacements dans les « territoires »avait su insuffler aux membres du gouvernement un engouement pour les voyages en TER et les entretiens à la presse quotidienne régionale, aujourd’hui moins prisée par des ministres en mal de notoriété. Sa successeure, Elisabeth Borne, formée au jospinisme, n’a guère ce parfum du terroir. Et si la polytechnicienne n’hésite pas à désigner l’extrême droite, elle soupire en privé à propos de Marine Le Pen, impuissante : « Si on avait la recette… Elle est très insaisissable. » L’ancienne préfète accable même les maires ruraux, qui, à ses yeux, attisent la colère de leurs administrés en répétant aux gens : « Vous êtes délaissés. »

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Au sein du gouvernement, les ministres se sont habitués à cette « obsession », disent-ils, qu’aurait le chef de l’Etat de « sentir le pays ». Un mantra aux allures d’éternel recommencement, après les promesses de revitalisation post- « gilets jaunes ». Malgré cela, l’électorat de Marine Le Pen a grossi de 2,7 millions de voix au cours du dernier quinquennat. « C’est moi qui l’ai affrontée deux fois. En 2027, je ne serai pas candidat, je ne serai donc pas comptable de ce qui arrivera », a achevé Emmanuel Macron en conclusion de l’après-midi studieux à l’Elysée, le 16 décembre 2022. Advienne que pourra.

Le Monde

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