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L’ACTU VUE PAR. Chaque samedi, Jeune Afrique invite une personnalité à décrypter des sujets d’actualité. La nomination du nouveau ministre de l’Éducation nationale a donné lieu à une levée de boucliers au sein de l’extrême droite. Explications du président de SOS Racisme, Dominique Sopo.

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Est-ce son profil d’universitaire et d’intellectuel reconnu qui a le plus choqué l’extrême droite, selon vous ?

L’extrême-droite identifie Pap Ndiaye comme quelqu’un qui ne baisse pas la tête. Les racistes peuvent apprécier des personnes noires ou arabes si ces dernières expliquent qu’il n’y a pas de problème de racisme en France ou n’ont aucune analyse critique à porter sur la question du passé colonial français.

A contrario, Pap Ndiaye fait partie de ces intellectuels ou militants très régulièrement ciblés par tous ceux qui ont un problème avec la question de la lutte contre le racisme, parce que c’est un Noir, qui a, en plus, l’outrecuidance de poser des questions à la société française. Et cela leur est insupportable. Par ailleurs, que Pap Ndiaye soit un homme et non une femme a été extrêmement peu commenté, bien que ce soit l’un des éléments à relever.

Que voulez-vous dire ?

Régulièrement, depuis 2007, des femmes d’origine maghrébine, d’Afrique sub-saharienne ou d’outre-mer occupent des postes gouvernementaux importants, comme Rachida Dati, Christine Taubira ou Najat Vallaud-Belkacem. Cette situation s’est quasiment installée dans la normalité, même si cela a pu entraîner parfois des violences verbales et symboliques, comme on a pu le voir à l’encontre de Christiane Taubira.

Les hommes issus de la diversité sont, eux, presque absents des gouvernements de la Ve République

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En quoi cette question de l’homme est-elle importante ? 

Si, en général, il n’y a eu que des femmes à avoir été nommées jusque-là, c’est d’abord parce que les hommes déjà installés ne désirent pas partager le pouvoir en faisant une place à la diversité. Dans le cas des femmes, c’est différent. Les partis sont désormais soumis à une forme d’obligation morale ou de stratégie politique, et ne peuvent plus présenter de gouvernement à forte majorité masculine sans que cela ne pose un problème. Autant, donc, que cette parité soit porteuse d’un autre critère avec lequel composer, celui de la diversité.

Pour l’extrême droite – et plus généralement pour le camp du racisme, qui va bien au-delà de l’extrême droite –, la question de l’homme est tout à fait particulière, parce que, en plus de les voir comme ceux qui vont réduire les places qu’ils occupent, il y a l’idée sous-jacente d’un danger venu des hommes issus de l’immigration : ce sont ceux qui, quelque part, incarnent l’image du « grand remplacement », ceux qui viendront « prendre nos femmes ».

Éric Zemmour a d’ailleurs exposé très ouvertement son point de vue en la matière dans son livre Le Premier Sexe (Denoël, 2006), lorsqu’il écrit que les femmes blanches délaissent les hommes blancs et se sont tournées davantage vers des hommes plus jeunes et plus virils, venus de l’autre côté de la Méditerranée. Derrière ce « danger » qu’incarnerait l’homme issu de l’immigration, se pose la question de qui va « contrôler nos femmes ». Et celle-ci est extrêmement présente dans la vision du monde de ceux qui sont traversés par le racisme.

DANS LA CONSTRUCTION DES HOMMES ET DES GARÇONS ISSUS DE L’IMMIGRATION MAGHRÉBINE ET SUBSAHARIENNE, ÊTRE CONSTAMMENT PRIVÉ DE L’ACCÈS AU POUVOIR EST TRÈS MALSAIN

(…) Jeune Afrique

(Merci à BB)

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