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À la lumière de son expérience personnelle, l’enseignante et essayiste Fatiha Agag-Boudjahlat juge que la proposition de l’ancien ministre socialiste, vite reniée par l’intéressé devant le tollé à gauche, avait le grand mérite de dire des réalités passés sous silence.

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Les diasporas ont toujours été des vaches à lait pour les pays dont les immigrés sont originaires, qu’ils en soient ressortissants ou non. L’exemple de l’Algérie est à cet égard archétypal : après deux ans de blocage en raison du Covid, les immigrés et leurs enfants peuvent enfin y retourner… à prix d’or, l’État conservant le quasi-monopole du transport aérien pour la compagnie aérienne algérienne. Les billets d’avion sont à 1 000 euros, il est moins cher d’aller en Thaïlande que d’aller en Algérie au départ de la France. Beaucoup d’enfants d’immigrés ont fait le choix de prendre, assez tard, la nationalité algérienne, quand l’État algérien a fait exploser le prix du visa, et sitôt la menace du service militaire expirée. Les rapports des immigrés et de leurs enfants au pays d’origine est complexe : ils savent la corruption, la hagra (abus par la force) des institutions, mais c’est le pays de leurs parents, le leur, ils l’aiment. Rapport complexe tout en étant financièrement très rentable, au point de pouvoir parler d’aide au développement implicite et d’évasion fiscale et sociale assumée.

Je racontais dans mon livre Les Nostalgériades que j’avais réalisé récemment que la pauvreté de ma famille, ayant bénéficié des Restos du cœur et du Secours catholique, avait été accentuée par les arbitrages budgétaires et financiers de mes parents : la majeure partie de l’argent, des salaires mais aussi des aides sociales, partait en Algérie dans la construction d’une grande maison (dans laquelle nous ne vécûmes jamais, mon père ayant « réservé » une autre femme, plus jeune, au pays). Nous n’aurions pas dû vivre aussi mal, pas avec le niveau de prestations sociales que nous touchions. Ma naissance en France est également due à une forme de « benchmarking » assumée de mon père : il fit venir ma mère et ses quatre garçons vivant en Algérie, parce que c’était rentable. Il n’avait jamais été dans ses intentions que nous restions en France. C’est le statut des aides sociales qui est en question : elles ne sont pas conçues pour être un financement à la vie au bled, à la construction de somptueuses maisons dans le pays d’origine, tandis que, pour économiser, ceux qui la perçoivent restent habiter, en France, dans des quartiers dégradés et ghettoïsés.

Cette réalité ne coïncide pas avec la vision misérabiliste de l’immigration et de ses descendants souvent véhiculée : les immigrés gèrent mieux leur budget que le gouvernement ne gère celui de la France. Et ils font des choix. Ils arbitrent entre des législations et choisissent le pays dans lequel celle-ci est la plus favorable. Ils arbitrent encore au moment de choisir leur logement. Ils pourraient vivre dans plus petit et mieux situé, ou ils pourraient accepter de payer plus cher un logement de taille similaire dans un meilleur quartier. Mais, pour le prix d’un petit logement ici, vous pouvez avoir une villa au bled, quel que soit le bled en question. La différence de coût de la vie et de l’immobilier entre la France et les pays africains ou sud-asiatiques est en faveur des diasporas. Un salaire juste suffisant au regard du coût de la vie en France permet l’aisance dans les pays plus pauvres.

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Le Figaro


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