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Ce n’est pas parce qu’on a cassé le thermomètre que le problème n’existe pas », résume Benjamin Moignard, professeur à CY Cergy Paris Université. L’image traduit le sentiment de nombre de spécialistes de l’école à l’égard du « tabou » entourant la question de l’origine ethnique dans le système scolaire. « Les seules informations disponibles sont les nationalités des élèves et de leurs parents, et encore, elles ne sont pas toujours précisées, abonde Maïtena Armagnague, professeure de sciences de l’éducation à l’université de Genève. Dès qu’un élève a la binationalité, il disparaît des statistiques en tant qu’étranger. » Comment l’école peut-elle, alors, évaluer le rôle des origines dans les trajectoires des élèves, et, partant, dans la construction d’éventuelles inégalités ?

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La sociologie scolaire a démontré, de longue date, la surreprésentation des enfants issus des classes moyennes et aisées dans les filières générales du lycée, puis dans les études supérieures. Elle a plus de mal, en revanche, à mesurer l’effet des origines, de même que celui d’une ségrégation socio-ethnique « visible à l’œil nu » dans certains établissements, défend Françoise Lorcerie, directrice de recherche émérite au CNRS.

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Outre ce débat sur la primauté du milieu social, les données sur l’origine migratoire (nationalité des élèves ou des parents) trouvent vite leurs limites : elles ne permettent pas de mesurer l’appartenance ethnique, et encore moins d’éventuelles discriminations. Pour contourner ce problème, le sociologue Georges Felouzis a utilisé les prénoms des élèves, relevés dans le fichier des 144 000 inscrits des collèges de l’académie de Bordeaux pour 2000-2001. Les prénoms sont utilisés comme « proxy », indicateurs indirects d’une « origine culturelle », y compris pour des enfants de nationalité française. L’étude a conclu que 10 % des établissements scolarisaient 26 % des élèves d’origine étrangère.

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La recherche parvient ainsi à dessiner, d’une étude à l’autre, un faisceau d’indices qui convergent vers un impact plus ou moins fort de l’origine ethnique.

Le Monde

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