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"Je ne parle pas comme ça à la maison": enquête sur ces bourgeois qui disent "wallah"

Dans les cours des établissements scolaires comme en dehors, adolescents et jeunes adultes sans lien avec la langue arabe se plaisent à lui emprunter certains mots pour ponctuer leurs phrases avec panache. Ridicule ?

« Quand je vous en parle, là, j’ai encore les nerfs. » Karim, 24 ans, s’agace, s’emporte, puis en rit immédiatement. « C’est con, ce n’est pas grand-choseMais quand même ! » Il y a deux ans, après plusieurs réorientations scolaires hasardeuses, le jeune homme atterrit en première année de droit à l’université de Grenoble. Il y découvre une matière qui le passionnera et qui est encore la sienne aujourd’hui. Dans les amphis, cet homme originaire de la cité Mistral, à quelques kilomètres de son nouvel établissement, y trouve une faune bien particulière. « Très peu mixte », sûre d’elle, voire « provocante ». « Je ne connais pas le pedigree de chacun de mes camarades mais ça sent fort les enfants de notables quand même, se marre-t-il. Les sacs Longchamps, les Stan Smith toutes propres, le petit foulard au poignet, ça ne trompe pas. »

À ces marqueurs qui, selon lui, séparent les gens « bien nés » des autres, se mêle l’utilisation d’un langage qui l’a « surpris », explique-t-il. « Parmi eux, deux ou trois ont rapidement fait les malins à jurer sur le Coran ou à lancer des “wallah” intempestifs [littéralement “par Allah”] juste pour faire les malins, rapporte-t-il. Alors que les mecs s’appellent Florian ou Julien ! » Une « provocation », éructe-t-il : « Ça les amusait de singer les rebeus de banlieue, de jouer les mecs déter’ [déterminés] ou indisciplinés. » Karim raconte qu’il bout encore aujourd’hui, notamment chaque fois qu’un nouveau mot apparaît dans la bouche de ses camarades (comme « starfoullah », signifiant à l’origine « Je demande pardon à Allah », ou « mashallah », « Selon la volonté de Dieu »). Chaque fois accompagnés de ricanements. « Avec mes trois collègues, on a fini par s’en amuser, précise-t-il. Quand ils lancent leurs mots d’arabe facile, on répond “O.K. Mokhtar le Blanc !” ou “Bsahtek [bien joué] Marcelin !”, ça les calme parfois. » (?…)

www.marianne.net

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