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Article d’Éric Verhaeghe sur le mouvement “Nuit Debout”. Fondateur de Tripalio, une start-up sur la vie syndicale, cet ancien élève de l’ENA a occupé des fonctions dans le monde patronal et assumé divers mandats paritaires. Il fut notamment administrateur de la sécurité sociale.

Fait par les Blancs pour les Blancs, fait par les bourgeois pour les bourgeois, fait par les bobos pour les bobos, il ne devrait pas tarder à mourir de sa belle mort, à moins qu’une mutation du virus ne conduisent à une radicalisation et une popularisation inattendue.

Ce qui frappe au premier abord dans la Nuit Debout, c’est la forte homogénéité sociale du mouvement. D’ordinaire, la place de la République est bigarrée. Ce sentiment de mélange est volontiers accru par les événements qui se déroulent régulièrement sur la place: occupation périodique par des migrants ou par des familles africaines menacées d’expulsion et protégées par le Droit au Logement, mais aussi quadrillage par les familles Roms qui dorment dans la rue avec leurs bébés et leurs enfants.

Le tour de force de la Nuit Debout est de babiller sans lassitude apparente sur le sexe des anges solidaires, de gauche, révolutionnaires, progressistes et autres adjectifs bisounours, dans un entre-soi très bien huilé. Ici, on est bien, on est tranquille, on est humaniste, mais on est d’abord des quartiers centraux de Paris.

On adore dénoncer la précarité et la discrimination, mais selon l’étiquette bobo en vigueur, qui accorde une place nulle aux «minorités visibles», manifestement peu intéressées par les sujets qui se traitent. […]

Mais la jeunesse qui souffre vraiment (je veux dire pas par choix) ne connaît manifestement pas l’adresse où il faut se rendre. Ces blacks, ces beurs, ces décrocheurs scolaires qui zonent à longueur de journée ou n’imaginent pas qu’ils pourraient un jour gagner plus de 2.000 euros par mois, ces tombereaux de sacrifiés qui sont autant de plaies ouvertes dans nos banlieues, sont invisibles ici.

Une autre caractéristique de la Nuit Debout tient à son aversion pour le salarié. C’est l’Autre: on le plaint, on se bat pour lui, mais on ne le côtoie pas. […]

Le Figaro

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