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[…] C’était aussi la rentrée, la semaine dernière, dans les 32 ESPE, qui ont succédé à ce qu’on appelait hier les “IUFM”, et où se forment les futurs enseignants. Une rentrée moins confidentielle et plus polémique que d’habitude, du côté de l’ESPE qui dépend de l’université Paris Descartes.

En effet, la photo d’un support de cours projeté par la chercheuse en neurosciences Ania Aïte, mercredi 4 septembre, dans le cadre de la séance inaugurale, a déclenché un tollé. Titre du document qui circule sur les réseaux sociaux, visuel à l’appui : “Comment le groupe d’appartenance influe t’il [SIC] sur notre capacité à prendre la perspective d’autrui au cours du développement ?

Plus simplement, l’étude présentée consisterait à mesurer la capacité à se mettre à la place de l’autre. Selon l’âge que l’on a, mais aussi selon qu’on doive se mettre à la place d’un “Caucasien” ou d’un “Africain”. […] Car l’étude (encore parcellaire et pas forcément corroborée si l’on en croit les marges d’erreur annoncées) présentée par Ania Aïte (maîtresse de conférences en psychologie du développement à Paris Descartes) est extraite d’une recherche collective menée avec une doctorante, Manali Draperi (en thèse depuis 2017 et un master en sciences cognitives à l’Ecole normale supérieure). Or leur trajectoire à chacune éclaire aussi la polémique autour des termes projetés sous le nez des futurs enseignants.

Le sillon de ces deux chercheuses en sciences cognitives est en effet irrigué de tout un corpus de recherches en neurosciences, qui s’écrivent en anglais et souvent ne rechignent pas à utiliser des termes comme ceux qui font aujourd’hui scandale en France. Et c’est depuis ces recherches-là que des laboratoires (comme ceux par lesquels les deux chercheuses sont passées) entendent lire et décrire le monde social – y compris ses préjugés. Les termes “Caucasien” et “Africain” qui surgissent au tableau le 4 septembre témoignent-ils alors de vieux relents de théories qui infusent du côté d’une biologie datée, ou plutôt d’une offensive pleine d’avenir qui charrierait toute une sémantique nouvelle – quitte à balayer pas mal de tabous au passage?

Les chercheuses incriminées ne parlent en tous cas pas depuis des positions périphériques : la première, Aina Aïte, dépend du LaPsyDé, à la tête duquel on trouve aussi celui qui co-ridige la thèse de la seconde, Manali Draperi : Grégoire Borst. Or c’est à ce laboratoire que l’Éducation nationale a décidé de confier une partie de la formation des enseignants, et notamment leur acculturation aux neurosciences. Et dans le sillage de ce même laboratoire qu’ils peuvent désormais compléter leur formation avec le tout nouveau “DU en neuroéducation” qui vient de s’ouvrir cette année moyennant 112 heures de cours. Au mois de mai 2019, c’est justement Grégoire Borst qui répondait au journal Le Monde pour faire connaître cette formation créée sous l’aile de Jean-Michel Blanquer. […]

France Culture

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