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André Delpuech, directeur du Musée de l’Homme à Paris, était invité à l’occasion d’une exposition consacrée à l’incroyable destin des esclaves malgaches oubliés de Tromelin. À la fin du XVIIIe siècle, après un naufrage, des esclavagistes abandonnent 80 personnes sur cet îlot d’à peine 1 km² perdu dans l’Océan indien. Seuls huit survivront et seront sauvées, 16 ans plus tard.

En 1761, l’Utile, un navire français, s’échoue sur l’île Tromelin, à 500 km des côtes de Madagascar et de celles de la Réunion. A bord se trouvent quelque 160 esclaves malgaches, dont la moitié se noie. L’équipage repart, abandonnant les captifs sur l’îlot désert. Une exposition au musée de l’Homme raconte leur extraordinaire histoire, reconstituée notamment grâce à l’archéologie. A cette époque, la France et l’Angleterre se combattent au cours de la “guerre de Sept Ans”. Une sorte de conflit mondial avant l’heure.

La frégate Utile a été envoyée à Madagascar pour ravitailler les colonies. Dans la zone de l’île de France (aujourd’hui île Maurice), le gouverneur de cette dernière a provisoirement interdit la traite des Noirs. Mais ce trafic rapportant des sommes considérables, des marins se mettent à leur compte. Le capitaine du navire, Jean de Lafargue, a embarqué clandestinement 160 esclaves malgaches. Il a choisi de les vendre discrètement sur une autre île. Ce qui l’oblige à modifier sa route.

Dépourvu de cartes fiables et contre l’avis de son pilote, Jean de Lafargue navigue la nuit. L’Utile fait alors naufrage à proximité de Tromelin. La moitié des esclaves se noient, ainsi que 18 marins. Les 210 rescapés gagnent l’île, qu’on appelle alors l’île des Sables.

Les survivants s’organisent. Un puits est creusé. Une embarcation est construite avec les débris de l’épave et grâce aux “secours que nous avons tirés depuis le premier moment jusqu’au dernier, de ces malheureux esclaves”, écrira par la suite le premier lieutenant, Barthélémy Castellan du Vernet. Mais seuls les Français repartent. Ils promettent de revenir chercher les captifs, que “nous avons été obligés (d’)abandonner”, faute de place, dixit le premier lieutenant.

“Les Noirs qu’on était forcés de laisser dans l’île, demeurèrent dans un silence accablant au moment du départ. Mais quel parti prendre dans une pareille extrémité? Ce fut de laisser les vivres aux malheureux Noirs en leur promettant de les envoyer chercher”, peut-on lire aujourd’hui dans un document de littérature populaire consacré à ce drame…

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