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Le fascisme militant de Le Corbusier, grand architecte du XXe siècle, est mis en lumière dans plusieurs ouvrages publiés à quelques jours d’une exposition au Centre Pompidou qui aura lieu du 29 avril au 3 août à l’occasion du 50e anniversaire de sa mort.

Le Corbusier, l’un des principaux représentants du mouvement moderne avec, entre autres, Ludwig Mies van der Rohe, Walter Gropius, Alvar Aalto et Theo van Doesburg. Il est le créateur de l’unité d’habitation de Marseille et de la Chapelle de Ronchamp (Haute-Saône), candidates au classement au patrimoine mondial. « l’unité d’habitation », concept sur lequel il a commencé à travailler dans les années 1920, expression d’une réflexion théorique sur le logement collectif.

« L’unité d’habitation de grandeur conforme » ne sera construite qu’au moment de la reconstruction après la Seconde Guerre mondiale, en cinq exemplaires tous différents, à Marseille (la Cité radieuse), Briey-en-Forêt, Rezé, Firminy et Berlin. Elle prendra valeur de solution aux problèmes de logements de l’après-guerre.

Sa conception envisage dans un même bâtiment tous les équipements collectifs nécessaires à la vie — garderie, laverie, piscine, école, commerces, bibliothèque, lieux de rencontre. Le Corbusier a également œuvré dans l’urbanisme et le design.
« Là où naît l’ordre, naît le bien-être. » Les premiers choix de Le Corbusier en architecture sont ceux qui définissent le purisme : simplicité des formes, organisation, rigueur. Cette vision est mêlée d’utopie, le bonheur étant l’une des clés de ses réflexions sur l’urbanisme. Son « langage » architectural s’applique aussi bien au logement économique qu’à la villa de luxe.

J’ai découvert que c’était un militant fasciste, tout simplement“, dit Xavier de Jarcy, auteur de Le Corbusier, un fascisme français (Albin Michel). Le Corbusier “a milité pendant vingt ans dans des groupes dont l’idéologie était très nette”, confirme François Chaslin, qui publie Un Corbusier (Seuil). “On l’a caché”.
“Je ne suis plus seul!”, lance Marc Perelman, auteur de Le Corbusier, une froide vision du monde (Michalon), qui a enquêté dès 1979 sur “les idées fascisantes” de l’architecte.
L’exposition “Mesures de l’Homme” à Pompidou ne fera aucune allusion à ces publications car elle “ne traite pas de l’ensemble de l’œuvre de Le Corbusier”, ont expliqué ses organisateurs, soulignant que “ses relations avec Vichy ont été traitées” lors d’une rétrospective en 1987.
 

 

Manipulateur
Membre du Comité d’experts de la Fondation Le Corbusier, Jean-Louis Cohen se dit “choqué par cette polémique“, dénonçant son “caractère manipulateur“. Il estime toutefois que François Chaslin a fait “une vraie recherche”. Or, François Chaslin, admirateur de Le Corbusier, qualifie le livre de Xavier de Jarcy de “rigoureux et solide“.
Pour lui, “cette polémique correspond à ce que les psychanalystes appellent ‘le retour du refoulé’: quand on cache trop une chose, un jour elle explose”. Charles-Edouard Jeanneret, dit Le Corbusier, né en 1887 à La Chaux-de-Fonds, en Suisse, fréquente dès les années 1920 à Paris des cercles fascistes, dont le Faisceau, selon ces nouveaux ouvrages.
Il devient proche du Dr Pierre Winter, leader du Parti fasciste révolutionnaire avec lequel il crée la revue “Plans”, et de l’ingénieur François de Pierrefeu qui lancera avec Le Corbusier le journal Prélude. L’architecte cautionne les articles “justifiant dans Plans l’antisémitisme nazi, et cosigne les éditoriaux haineux de Prélude“, relève Xavier de Jarcy.
En août 1940, Le Corbusier écrit à sa mère: “L’argent, les juifs (en partie responsables), la franc-maçonnerie, tout subira la loi juste“. En octobre, il ajoute: “Hitler peut couronner sa vie par une œuvre grandiose: l’aménagement de l’Europe“. Il y a aussi “des croquis antisémites“, déplore François Chaslin.

La Fondation Le Corbusier n’évoque cette période qu’en quelques mots sur son site internet: “1929: collaboration à la revue Plans”, “1933: membre du journal Prélude“, “1941: Séjour prolongé à Vichy“. Or, “le groupuscule constitué à la fin des années 20 chemine jusqu’en 1940 et tout ce petit monde se retrouve à Vichy“, dit Xavier de Jarcy.
Le Corbusier “a été à Vichy pendant dix-huit mois et occupait un bureau d’État à l’Hôtel Carlton“, précise François Chaslin. De retour à Paris, il devient, jusqu’en avril 1944, conseiller du théoricien de l’eugénisme Alexis Carrel.

Ces publications jettent aussi une lumière crue sur son urbanisme, dont le “Plan Voisin” qui proposait en 1925 de raser le cœur historique de Paris. “De son urbanisme, il n’en reste pas grand-chose”, admet Jean-Louis Cohen, défendant “son travail architectural poétique et intéressant”.

On dissocie ses idées, son urbanisme et son architecture, alors que c’est une même chose“, dit Marc Perelman. La “Charte d’Athènes”, éditée par Le Corbusier en 1943, devient la doctrine de la France démocratique des “30 Glorieuses”. On construit alors des “grands ensembles”, interdits à partir de 1973.

Huffington Post

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