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« Harry qui ? Aujourd’hui, c’est mon frère, le prince ! » Si, en ce 19 mai, le monde a les yeux tournés vers Windsor et le mariage royal, Yolaine, elle, trépigne sur le parvis de la mairie de Villeurbanne. « C’est un jour spécial. Anthony, c’est le petit dernier d’une fratrie de quinze. Il est arrivé du Congo à l’âge de 6 ans, quand notre mère est décédée. J’ai dix-sept ans de plus que lui, alors je l’ai élevé comme un fils. On va beaucoup penser à maman… », raconte-t-elle, les larmes aux yeux, dans sa jolie robe de dentelle bleue.

« Ah, voilà mes sœurs ! » Du cyan, du rouge, du vert… C’est le wax qu’elles préfèrent : quatre d’entre elles arrivent drapées du même tissu, façon jupe, robe ou tunique. « L’union du Congo et de Madagascar. Vous avez déjà assisté à un mariage africain ? Vous allez voir l’ambiance ! » lance Patrick, le mari de Yolaine, qui s’amuse d’être « la minorité blanche ». […]

Deux oui et beaucoup de larmes plus tard, Yolaine prend sa belle-sœur dans ses bras : « Bienvenue chez nous, madame Eleka ! » « C’était important pour moi de créer une structure familiale et de prendre le nom de mon mari », explique Volahanta, 27 ans, qui insiste sur l’importance d’une union entre deux cultures : « Demain, pendant le brunch, je serai en robe pagne, Anthony en boubou, et les invités apporteront des plats congolais et malgaches. »

Sous les youyous de Yolaine, les mariés redescendent sur le parvis, tandis que les sœurs Eleka entament un chant congolais traditionnel, qui se transformera vite en hymne de foot : « Allez Antho, allez, allez ! » Thiam, lui, passe de bras en bras, perplexe. « Il porte un prénom malgache, Riantsoa, et un prénom congolais, Kwélé », dit fièrement la grand-mère maternelle. Et Thiam, c’est… ? « Ses parents l’ont inventé ! »

Les samedis de printemps, à Villeurbanne, un mariage en cache souvent un autre, et un autre encore (jusqu’à douze par jour !). Dans le hall, Jennifer semble tendue, ou plutôt serrée. « J’ai commandé ma robe sur Internet, je ne l’ai reçue qu’hier, et là, j’ai du mal à respirer. » La jeune femme, Franco-Tunisienne de 29 ans au physique élancé, n’en est pas moins superbe. Incarnation du cool, Pierre, 33 ans, petite barbe et costume bleu, lui masse les épaules. Le jeune couple vit à Sousse, en Tunisie, mais a préféré s’unir à Villeurbanne plutôt qu’à l’ambassade de France pour « des questions de paperasse »

En retrait, une dame en tailleur simple observe sa fille avec une tendresse rare : « C’est important, le mariage. Comme je suis heureuse pour Jennifer… » Les souvenirs remontent. A 18 ans, Wassiba, Tunisienne, a épousé un « gars du Nord, un Ch’ti » qui travaillait à Sousse. « Vous imaginez la réaction de ma famille ? J’ai beaucoup souffert, mon mari a été obligé de se convertir à l’islam, notre vie a été difficile. Mais j’étais amoureuse. » […]

Le Monde

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