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Il n’y a pas eu de «fleuves de sang» en Grande-Bretagne, mais Enoch Powell et son discours raciste sont toujours populaires.

Le 20 avril 1968, il y’a cinquante ans de cela, le secrétaire à la défense britannique du cabinet fantôme Enoch Powell avait prononcé le fameux discours “fleuves de sang”
Pour marquer les cinquante ans de ce discours, la BBC a pris la décision de le diffuser en intégralité pour la première fois à la radio.

Cette décision a provoqué l’indignation de ceux qui auraient souhaité qu’on oublie que ce discours fut très populaire à l’époque.

Près de 74% des Britanniques étaient d’accord avec lui quand il disait que «Dans 20 ans, les noirs domineront les blancs dans ce pays.»(…)

Cinquante ans plus tard, le Royaume-Uni se retrouve au milieu d’un autre scandale sur l’immigration concernant des enfants de travailleurs caribéens invités à participer à la reconstruction de l’économie britannique après la Seconde Guerre mondiale et qui seraient menacés d’expulsion. La Grande-Bretagne a-t-elle vraiment changé au cours du dernier demi-siècle?(…)

La relation étroite qu’entretenait Powell avec l’extrême droite ne peut pas expliquer tout le soutien qu’il reçut à l’époque. Cela n’explique pas pourquoi les syndicats de gauche l’ont également soutenu, ou comment le gouvernement travailliste de gauche a introduit le Commonwealth Immigrants Act, quelques temps après le discours, mettant fin à une période où des personnes issues des anciennes colonies pouvaient venir librement au Royaume-Uni. Le discours de Powell résonnait clairement chez des millions, si ce n’est des dizaines de millions de britanniques.

Des personnalités diverses l’avaient publiquement soutenu. Eric Clapton, le célèbre guitariste, avait pris la défense de Powell sur scène en 1976 et avait demandé aux «étrangers» de rentrer chez eux.

L’ancien leader charismatique du parti travailliste, Michael Foot, l’avait qualifié de «personnalité exceptionnelle» et avait parlé de son renvoi du parti conservateur comme d’une «tragédie». Bien que l’idée n’ait jamais été mise en œuvre, Powell avait proposé la création d’un «ministère de la remigration» pour organiser des «rapatriements volontaires».

En juillet 1969, le Guardian qui critiqua le discours de Powell et ses «statistiques fallacieuses», posa néanmoins la question suivante: «Est-ce qu’on ne pourrait pas diminuer plus facilement la malheureuse concentration de communautés colorées dans quelques régions du pays par “le rapatriement volontaire” plutôt que par une politique de dispersion des immigrés à travers le territoire?»

Powell avait réussi à exploiter le mécontentement ressenti par le public face à l’immigration massive. Plutôt que de calmer les craintes des gens, il les avait incité à la violence.

Powell n’était pas un prophète. Il n’y a pas eu pas de «fleuves de sang», bien que l’immigration en Grande-Bretagne se soit poursuive. Cependant, le Brexit l’a emporté, à l’issue dune campagne axée sur l’immigration.

Il y a également eu des politiques en matière d’immigration scandaleuses que Powell aurait approuvées, comme cette directive anti-migrants qui a conduit entre autres, au scandale Windrush qui secoue actuellement la société britannique.

Ce scandale n’est pas vraiment une surprise. La tentation de la droite britanique de renouer avec la pensée de Powell n’a jamais vraiment disparu.

En 2012, le secrétaire d’Etat conservateur Iain Duncan Smith, avait écrit la préface d’un nouveau recueil d’essais, dans laquelle il exprimait de l’admiration pour Powell. Il avait regretté le ton incendiaire du discours mais estimait que Powell n’était pas raciste. Les jeunes conservateurs affirment eux aussi, en privé, que le slogan «Powell avait raison» ne devrait plus être abandonné à l’extrême droite.(…)

Al Jazeera

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