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«Libération» a enquêté sur le sexisme érigé en système au sein des classes préparatoires militaires par un puissant groupe d’élèves : les «tradis». Entre humiliations et harcèlement moral, tout est fait pour saper les ambitions des étudiantes.

[…] Les «bourreaux», ce sont eux : les Mohicans, la Mafia, l’Inquisition, la Ferme et les Gaulois. Des «familles» de garçons ultraconservateurs perpétuées chaque année par un système de parrainage, qui n’acceptent toujours pas la présence de jeunes filles dans la corniche. Elles sont pourtant officiellement admises depuis 1986, même si les premières étudiantes sont arrivées au début des années 2000. Ce groupe masculiniste, à la fois occulte et hyperstructuré, est officiellement interdit par l’autorité militaire. Et pour cause. Dans les couloirs de leurs dortoirs, ils brandissent fièrement le drapeau des confédérés américains, devenu dans le monde entier un signe de ralliement raciste, ou s’habillent avec des bretelles à ses couleurs. Selon des sources internes, des croix gammées auraient été retrouvées dessinées à la craie sur certaines chaises, avec l’inscription Deutschland über alles (un extrait de l’hymne allemand utilisé par les nazis). Le 20 novembre dernier, jour de la mort de Franco, des témoins rapportent les avoir entendus louer les «valeurs» du dictateur espagnol. Sur Facebook, les tradis «likent» des groupes qui militent contre l’avortement. Ces jeunes adultes, de 17 à 21 ans, sont nostalgiques «de la religion d’Etat, des colonies…»observe un de leurs anciens professeurs : «Et ils pensent qu’accorder des congés paternité, c’est contre-nature.» Tous les mercredis, ils vont à la messe au lycée et tous les dimanches à Versailles, ville voisine à environ 5 kilomètres de Saint-Cyr-l’Ecole, dans une église où elle est dite en latin. En 2013, une majorité de tradis ont rejoint la Manif pour tous et des autocollants du mouvement fleurissaient dans l’établissement.  […]

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Un ancien membre du lycée militaire de Saint-Cyr-l’Ecole raconte à «Libération» l’extrémisme de ses ex-camarades, souvent cathos réacs, misogynes et homophobes.

«Il faut attendre quelques semaines avant de voir le côté extrémiste du groupe. Ils se dévoilent entièrement quand ils savent que les petits nouveaux ne peuvent plus faire marche arrière. Les tradis ont quasiment tous le même profil : issus de familles “bourgeoises”, militaires, ils sont pour la plupart très catholiques et vont à la messe tous les mercredis et les dimanches. Une majorité d’entre eux sont également sympathisants d’extrême droite, genre Marine Le Pen, misogynes, racistes et homophobes. Ils ont de manière systématique un rejet de l’autre qui ne leur ressemble pas. Un petit délire de privilégiés réactionnaires.

«Mais moi, au début, j’étais trop obnubilé par le désir d’être l’un des leurs et par conséquent bien incapable d’avoir un avis critique sur leurs idéologies. J’étais d’ailleurs un des membres les plus virulents les premiers mois. Un bon petit soldat. Oui, je traitais les féminines de “grosses”, je pratiquais l’indifférence courtoise [ne plus parler aux filles, ndlr] et j’ai beaucoup ri lors du sketch de la jeune femme scalpée (lire ci-contre). Il faut savoir que chez les tradis, les filles des classes prépa sont le diable. Elles sont les moins considérées parmi tous les groupes. Elles sont des pestiférées, les voleuses de concours qui devraient plutôt s’occuper du foyer, les ennemies à éliminer. C’est une position qu’au début de l’année je commençais à accepter. J’étais un bourreau. Est-ce que je regrette ? Je me suis fait endoctriner… […]

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«La question du maintien des classes prépa militaires se pose»

Pour le sociologue Claude Weber, enseignant détaché aux Ecoles militaires de Saint-Cyr Coëtquidan, l’existence même de ces lycées noyautés par les «tradis» peut être remise en question. […]

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