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Analyse d’Ariane Chemin et de Raphaëlle Bacqué, journalistes au Monde, sur la conception de la laïcité à gauche et son attitude face à l’islam.
Elle n’a pas encore réellement investi le champ électoral, mais la querelle ressemble à la plus violente que la gauche ait nourrie en son sein depuis longtemps. Aujourd’hui, ce n’est plus sur des programmes économiques que la gauche se déchire, mais sur la religion et la laïcité, avec, en toile de fond, le terrorisme et la montée de l’islam radical. Prise en étau entre un Front national qui a capté une partie des catégories populaires et un électorat musulman qui ne lui est plus spontanément acquis, la gauche française se perd dans un grand débordement d’invectives qui menace de la fracturer durablement.
«Jamais je n’aurais pensé que la laïcité, fondement de la République, redeviendrait un enjeu politique et intellectuel», remarque le politiste Laurent Bouvet, proche du Parti socialiste.

Manuel Valls a résumé en une phrase choc, le 4 avril, au Théâtre Déjazet, l’essence de ce socialisme d’un nouveau genre : « Bien sûr, il y a l’économie et le chômage, mais l’essentiel, c’est la bataille culturelle et identitaire. »

« Le thème de l’identité nous est imposé par la situation géopolitique et les difficultés objectives comme le terrorisme », justifie Jean-Marie Le Guen, porte-parole de cette gauche vallsiste qui assume la contradiction des relations complaisantes que la France entretient avec l’Arabie saoudite.


Au cœur des discussions, le voile, bien sûr (pour ou contre, notamment, son interdiction à l’université), la nationalité (le combat sur sa déchéance pour acte de terrorisme a échauffé les esprits), mais aussi une multitude de sujets de tous les jours, des menus « sans porc » dans les cantines au siège qu’un machiniste de la RATP refuse d’occuper si une femme s’y est assise, en passant par le foulard d’une mère accompagnatrice des sorties scolaires. De quoi animer les déjeuners de famille comme les colloques – sans compter les ricochets de cette dispute sur le militantisme féministe, en pleine division lui aussi. […]

Les attentats du 7 janvier et du 13 novembre 2015 ont durci les positions. « Soudain, la main tendue aux musulmans n’a plus du tout été à la mode », résume dans un sourire Mehdi Ouraoui, membre du conseil national du PS.

[…] « Islamophobie », ­ « républicain » : le ballet des culpabilités et de la mauvaise foi danse autour de deux mots, récupérés par chaque camp. En principe, chacun est contre le racisme et pour la république. La réalité est plus complexe, qui oblige certains, comme le politiste Laurent Bouvet, à parler d’« antimusulman » plutôt que d’employer le terme connoté d’islamophobie. […] Le Monde

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