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24/02/15

Lors de son discours au CRIF, François Hollande a suscité la polémique en désignant les responsables de la profanation du cimitière de Sarre-Union par l’expression «Français de souche». Michèle Tribalat revient sur ce terme controversé.


(…) Certains sociologues lui reprochent de verser dans la racialisation ou l’identitarisme. Que cela vous inspire-t-il?
Cela me paraît assez stupide. C’est l’étiquette qu’ils ont l’habitude de coller à toute personne qui leur semble s’écarter des exigences politiquement correctes qu’ils cherchent à imposer dans le débat public. Cette traque insatiable du dérapage et du mot de travers transforme la lutte contre le racisme en une lutte titanesque contre la société tout entière.
Dans les années 90, Hervé le Bras vous avait reproché l’emploi de cette expression. Aujourd’hui, vous préférez, l’expression «natif au carré». Pourquoi? Quelle est la différence?
Hervé Le Bras m’avait cherché querelle au point de me consacrer de très nombreuses pages dans son livre Le démon des origines. Il voyait dans l’usage de «Français de souche» de sombres desseins qui devaient tout à une affiliation secrète à l’extrême droite. En fait, je n’employais l’expression ni pour choquer ni par choix idéologique, mais par nécessité pour désigner la population que l’Insee et l’Ined s’entêtent aujourd’hui à appeler «population majoritaire», appellation qui a, à leurs yeux, l’avantage de ne porter aucune charge identitaire et qui n’évoque qu’une supériorité numérique. Quand ils ne recourent pas à la formule du ni-ni: ni immigré ni descendant d’immigré.
Ce que ces subterfuges indiquent c’est que l’on ne peut échapper à la nécessité de désigner. Les plus acharnés sont souvent ceux qui n’ont pas eu à travailler vraiment sur les données se rapportant aux questions d’immigration et d’intégration. C’est évidemment plus facile. Lorsque l’Insee s’est mis enfin à utiliser les catégories de type ethnique, il a été confronté à ce problème. Il a fait, avec l’Ined, le mauvais choix. Dans l’étude des immigrés, l’Insee les compare aux «non immigrés», moi je les compare aux natifs. J’ai donc inventé l’expression «natifs au carré» pour désigner, au plus près de la chose, ceux qui sont nés en France de deux parents nés en France. J’en avais marre de ces cris d’orfraie à propos de l’emploi de «Français de souche». J’ai même eu recours un temps à l’expression d’origine française, pas très précise, je le reconnais. Mais, dans tous les cas, j’ai toujours expliqué ce que les termes utilisés recouvraient précisément. L’avantage de «Français de souche», mais c’est peut-être aussi son inconvénient, est qu’il est compris instantanément. Sans autre précision, le contenu est laissé à l’imagination de celui qui l’entend. Je ne suis pas sûre que mes «natifs au carré» arriveront à chasser les «Français de souche».
François Hollande a employé l’expression «Français de souche» pour qualifier les jeunes lycéens auteurs de la profanation du cimetière juif de Sarre-Union. Une façon de souligner que les actes antisémites commis ces derniers temps en France n’étaient pas le fait seulement de Français de confession musulmane. N’est-ce pas finalement une manière de les «stigmatiser»?
Non. La logique qui consiste à faire croire que nommer c’est exclure, stigmatiser, ne s’applique qu’aux minorités. Si vous appartenez aux natifs au carré, justement, vous êtes majoritaires et vous vous trouvez dans le camp des dominants. Désolée, dans ce cas, aucune excuse.
Figaro Vox

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