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L’époque classique en musique est relativement courte. De 1750, année de la mort de Bach, à 1800, une esthétique domine: le style dit “galant”. Mozart, et avant lui Haydn en Allemagne, en sont les plus illustres représentants. La France, en proie aux tourments de l’époque révolutionnaire, aura son compositeur “officiel”, François-Joseph Gossé, dit “Gossec”. A ses côtés, André Grétry et Étienne Méhul s’illustrent par leur savoir-faire.

François-Joseph Gossec (Gossé de son vrai nom) (Vergnies, le 17 janvier 1734 – Passy, le 16 février 1829) est un compositeur, violoniste, directeur d’opéra et pédagogue français.

Né sous Louis XV, deux ans après Haydn (1732-1809), il a 16 ans à la mort de Bach (1750), 22 ans à la naissance de Mozart (1756) qui deviendra son ami, 32 à la mort de Jean-Philippe Rameau (1764); il sert le Prince de Condé et le Prince de Conti et dirige l’École royale de Chant, futur Conservatoire de Musique dont il est membre du Directoire.

Nommé compositeur officiel pendant la Révolution française, c’est aussi le musicien le plus honoré sous Napoléon Ier (membre de l’Institut, Légion d’honneur… ). (Wikipédia)

Gossec a composé 50 symphonies, 16 opéras, de la musique de chambre (on appelle “musique de chambre” de la musique écrite pour moins de 8 instruments; au delà, on considère qu’il s’agit d’un “orchestre”) et de la musique vocale. Bref, Gossec, quasi-inconnu du grand public, fût un compositeur très prolifique.
Aujourd’hui, nous nous arrêterons sur le premier mouvement de la troisième symphonie, en ré majeur dite “la chasse”. (Jusqu’à 4’21).

Ce premier mouvement de symphonie est caractéristique pour plusieurs raisons. Le thème de la chasse, tout d’abord, qui, depuis le moyen âge évoque la noblesse, et est très utilisé dans la musique, ceci jusqu’au XIXe siècle.
Vous entendez les cors. Ce sont eux qui donnent à cette musique cette couleur si particulière.
Le cor est un instrument peu véloce. Si il ne possède pas de pistons (cor naturel), il ne peut jouer confortablement que les notes du spectre harmonique, soit, pour un cor en fa: fa, do, la, mi bémol, sol, et si bécarre (du plus facile au plus difficile).
Ceci explique que les cor de chasse semblent toujours jouer “les mêmes notes”. C’est ce qui fait leur charme! Je ne peux être plus précis ici, mais écoutez, et vous sentirez un caractère répétitif, simple, des consonances.
Généralement, 2 cors jouent ensemble. Au fil du XIXe siècle, l’orchestre grandissant, l’on fera appel à 3 ou 4 cors, et à des soli de cor, comme Tchaïkovski, par exemple, dans la cinquième symphonie. Le cor n’évoque plus la chasse, mais prend des couleurs automnales, voire tragiques. C’est devenu un instrument lyrique. Dans une partition d’orchestre, il se situe d’ailleurs entre les bois et les cuivres.

Après l’invention des pistons, le cor devient “chromatique”, c’est à dire capable de jouer toutes les notes, mais il reste plus à l’aise sur les notes citées.
C’est pourquoi il existe différents cors, pour pouvoir jouer toutes les notes facilement selon la tonalité du morceau. Les cors sont principalement en fa ou en si bémol, mais il en existe d’autres.
Revenons à notre symphonie
Première observation : le clavecin a disparu. Omniprésent à l’époque baroque, il est éliminé de l’orchestre à l’époque classique, même si les toutes premières symphonies de Mozart l’utilisent encore.
Une introduction lente et solennelle, héritage de l’ouverture à la française, puis commence l’allegretto poco allegro. Les mouvements, à cette époque, portent le nom du tempo, et parfois, comme ici, une petite indication d’interprétation. “allegretto”, indique le caractère léger, dansant de la pièce, en opposition à l’introduction “grave-maestoso”.
La structure de ce premier mouvement est l’ancêtre de la “forme sonate”, et il est bon de s’y arrêter. Cette forme sonate est la structure de presque tous les premiers mouvements de n’importe quelle œuvre qui en comporte, à l’époque classique. SI vous entendez une sonate, une symphonie, un concerto classique, vous pouvez être presque certains que le premier mouvement sera une forme sonate. Alors quelle est cette forme si parfaite?
La structure est simple: exposition/ développement/ ré-exposition/coda (conclusion).
– L’exposition est l’énonciation par le compositeur des deux thèmes. Si on est en majeur, comme ici, le premier thème est dans la tonalité principale, ré majeur, et le second dans la tonalité dite “de la dominante”. Vous vous rappeler de l’accord de dominante, n’est-ce pas? Une quinte au dessus. Soit la majeur. l’exposition est souvent reprise.
– Le développement est un passage souvent plus tendu, modulant, voire contrapuntique (vous connaissez tous les termes, maintenant). Autrement dit, le compositeur montre de quoi il est capable.
– Puis, on retrouve nos deux thèmes, mais tous les deux dans la tonalité principale, cette fois; c’est la ré-exposition.
Pour finir, une petite conclusion qu’on appelle “coda”.
Ceci est la forme sonate type. Mozart, et plus tard Beethoven la perfectionneront, et peu à peu, elle disparaîtra, mais tous les compositeurs classiques, romantiques, et même contemporains dignes de ce nom la maitrisent à le perfection. C’est un cadre qui donne la liberté. Un canevas qui permet l’expression du génie, en quelque sorte. Un peu comme la fugue.
Dans notre pièce, la forme sonate est encore embryonnaire, mais on peut déjà la reconnaître.
EXPOSITION
– de 0’51 à 1’31, énoncé du premier thème, bâti principalement sur des accords de tonique et dominante, que vous reconnaissez maintenant!
– à 1’31, petit “pont”, qui nous conduit vers le deuxième thème. On fait même un petit tour en mineur, vous avez entendu?
– à 1’46, énoncé du 2e thème en la majeur, comme il se doit.
DÉVELOPPEMENT
– à 2’30, début du développement, partie plus tendue et modulante, comme prévu, on passe par des tonalités mineures.
RÉ-EXPOSITION
– à 2’57, retour de la tonalité de ré majeur, et de l’esprit du premier thème.
Il ne s’agit pas d’une ré-exposition au sens strict, mais Gossec ramène la tonalité de Ré majeur et son côté éclatant avant la conclusion.
– à 3’35, début du pont pour amener le deuxième thème, cette fois en ré majeur
– à 3’57, esprit du deuxième thème (pas strict), en ré majeur.
CODA
– à 4’05, conclusion éclatante en ré majeur.
Comme vous pouvez le constater, le forme sonate est en train d’éclore, et c’est en Allemagne qu’elle portera ses plus beau fruits. Pourquoi le nier? L’époque classique française n’est pas aussi féconde qu’outre-Rhin. Écoutez les symphonies de Haydn, Mozart, et reconnaissez peu à peu la forme sonate.
Thèmes 1 et 2 très contrastés, développements géniaux, coda comportant un nouveau développement, contrepoint abouti… Vous verrez que si cette forme est rarement strictement respectée, elle sert toujours de modèle dans ces premiers mouvements.
Voici le premier mouvement de la symphonie en sol mineur de Mehul:

EXPO
Thème 1 et pont jusqu’à 1.38, thème 2 (si bémol majeur, le “relatif majeur”, voir semaine dernière) jusqu’à 3.00.
DÉVELOPPEMENT
Jusqu’à 5’43 (à la fin du développement, le 2e thème est entendu, mais cette fois en en sol majeur).
REEXPO
Retour de sol mineur, seulement le 1er thème et ré-exposé.
CODA
A partir de 6’58
Bonne semaine!
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