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Tribune libre de Paysan Savoyard

Constatant que le nombre des étrangers ayant acquis la nationalité française avait baissé en 2011, le ministre de l’intérieur, M. Valls, a déclaré (conférence de presse du 28/09/12) qu’il souhaitait augmenter ce nombre pour revenir aux niveaux antérieurs. La naturalisation est en effet selon lui un moyen de favoriser l’intégration des personnes d’origine immigrée.

En 2011 les acquisitions de nationalité se sont élevées à 112.000 contre 140.000 l’année précédente. En moyenne de 2000 à 2010, elles ont été de 140.700 par an.

Mais les chiffres officiels d’accès à la nationalité ne rendent compte que d’une partie de la réalité : le nombre des personnes d’origine immigrée accédant chaque année à la nationalité française est bien supérieur à 112 ou 140 000.

Pour s’en apercevoir il faut passer en revue les voies d’acquisition de la nationalité, qui sont au nombre de 6 :

  • La filiation

L’enfant né de parents dont l’un au moins est Français obtient automatiquement la nationalité française à la naissance. C’est l’application du « droit du sang ». Autrement dit, les enfants des immigrés qui ont obtenu la nationalité française sont Français. Ces personnes d’origine immigrée devenant françaises par filiation ne sont pas comptabilisées dans les statistiques des acquisitions de la nationalité.

  • La naissance en France lorsque les parents sont également nés en France

L’étranger né en France de parents dont l’un au moins est lui-même né en France obtient automatiquement la nationalité française à la naissance. C’est l’application de ce que l’on appelle le droit du sol. Là encore ces Français d’origine immigrée ayant obtenu la nationalité à la naissance ne sont pas comptabilisés dans les acquisitions de la nationalité.

  • La naissance en France

L’étranger né en France et qui y réside obtient automatiquement la nationalité française à l’âge de 18 ans (et non à la naissance, à la différence des enfants nés en France dont l’un des parents y est lui-même né ; voir plus haut). Il s’agit là encore d’une application du « droit du sol ». L’attribution automatique de la nationalité est cependant soumise à une condition : la résidence en France doit être stable (l’étranger doit avoir résidé en France au moins 5 ans depuis l’âge de 11 ans). Ces personnes ayant obtenu automatiquement la nationalité à 18 ans du fait de leur naissance en France ne sont pas non plus comptabilisées dans les statistiques des acquisitions de la nationalité.

Cet étranger né en France peut demander la nationalité française de façon anticipée, à partir de l’âge de 13 ans. En 2011 cette naturalisation par anticipation a bénéficié à 23 000 étrangers, qui eux sont comptabilisés dans les acquisitions de la nationalité.

  • Le mariage avec un Français

L’étranger qui se marie avec un Français obtient la nationalité française s’il en fait la demande. La demande ne peut être présentée que 4 ans après le mariage, en justifiant d’une communauté de vie avec son conjoint (il s’agit d’empêcher les mariages fictifs). En outre le conjoint étranger doit manifester une bonne assimilation (connaissance suffisante de la langue française ; absence de condamnation). En 2011, 21.000 étrangers ont obtenu la nationalité par mariage.

  • La résidence en France

L’étranger résidant en France régulièrement (c’est-à-dire de façon non clandestine) depuis au moins 5 ans peut demander la nationalité française. Certaines conditions doivent être réunies : maîtrise suffisante de la langue française ; connaissance des droits et des devoirs attachés à la citoyenneté ; absence de condamnation. La naturalisation n’est pas un droit : même si les conditions sont réunies, elle peut être refusée. En pratique 70 % des demandes de naturalisations sont accordées. En 2011, il y a eu 45.000 naturalisations (y compris les réintégrations dans la nationalité).

  • L’« effet collectif » de l’acquisition de nationalité

L’étranger mineur dont l’un des parents a obtenu la nationalité française par l’une des voies ci-dessus, l’obtient lui-même automatiquement. 20.000 personnes ont obtenu la nationalité en 2011 à ce titre.

En additionnant les données ci-dessus (plus 3.000 réintégrations dans la nationalité française) on obtient 112.000 naturalisations par an. Mais, redisons-le, ces 112.000 naturalisations ne rendent compte que d’une partie de la réalité. Comme nous venons de le voir, trois catégories de personnes d’origine immigrée obtiennent la nationalité française sans apparaître dans les statistiques : les enfants de Français ; les enfants nés en France de parents nés en France ; les enfants nés en France, y résidant et ayant obtenu la nationalité automatiquement à 18 ans.

Autrement dit le nombre de personnes d’origine immigrée qui deviennent Français chaque année est bien plus élevé que 112 ou 140.000. Pour s’en tenir aux naissances, nous évaluons pour notre part le nombre de naissances dans les familles issues de l’immigration non européenne a au moins 250 000 par an, soit un tiers du total des naissances : la plupart de ces personnes accèdent à la nationalité française (les premiers immigrés non européens étant arrivés en France dans les années soixante, ce sont maintenant les personnes de la troisième génération issue de cette immigration qui obtiennent la nationalité par filiation).

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Cette question de la nationalité a-t-elle une importance ?

Les conséquences de la détention de la nationalité française sur l’accès aux prestations et aux services publics sont limitées : les étrangers en situation régulière ont en effet les mêmes droits que les Français (ce qui est d’ailleurs profondément anormal) du point de vue de l’accès aux soins, des prestations sociales, du logement social ou de l’accès à l’éducation nationale.

La détention ou non de la nationalité conditionne en revanche l’accès à la fonction publique, qui est réservé aux personnes de nationalité française et aux Européens.

Mais la différence la plus importante entre Français et étrangers tient au droit de vote. En l’état actuel de la loi, seuls les Français votent (toutefois les résidents de nationalité européenne peuvent voter aux élections locales).

La gauche, on le sait, est favorable au droit de vote des étrangers non européens. La réforme figurait dans les engagements de campagne de M. Hollande. Il semble que M. Hollande a aujourd’hui abandonné l’idée de faire voter cette réforme au cours de son mandat (M. Sarkozy avait suivi la même voie : après s’être déclaré favorable au vote des étrangers, il avait changé d’avis une fois élu). Quoi qu’il en soit, le débat sur le droit de vote ne concerne que les élections locales. Le droit de vote aux élections nationales est réservé aux Français et aucun courant politique ne propose de remettre en cause ce principe.

L’accès des immigrés à la nationalité française est donc un enjeu important : il leur permet de participer aux scrutins nationaux décisifs, comme l’élection présidentielle, et d’influer sur l’orientation de la politique française.

C’est ainsi que le vote des Français d’origine immigrée a manifestement fortement pesé sur l’élection de 2012 : M. Hollande lui doit de toute évidence son élection (nous reviendrons sur ce point dans un prochain article).

Dans ces conditions, la gauche a tout intérêt à accroître encore les flux migratoires ainsi que le nombre des acquisitions de nationalité : on comprend le désir de M. Valls d’augmenter le nombre des naturalisations.

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