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Sur son lit d’hôpital, Claude souffre le martyre. La douleur due aux lésions à son foie et à sa rate est telle que son récit s’entrecoupe d’instants où il se fige, le visage crispé, la respiration bloquée. Par crainte de représailles, il ne donne que son prénom. «Ce que je dirais à ces jeunes si je les avais maintenant face à moi? Je leur demanderais: «Etes-vous heureux? Ça vous paraît normal d’avoir démoli un type qui pourrait être votre grand-père?»

Tout débute samedi soir. Claude, 61 ans, son amie, Nicole, et Julia, 14 ans, fille du sexagénaire, quittent le restaurant La Gondola, à Villeneuve, vers 23 h 45. Ils y ont fêté un anniversaire de mariage avec un groupe d’amis. Au lieu de traverser la ville, Claude suggère de profiter du bord du lac.

Sur le quai sombre, quatre ados échangent des numéros de portable. Ils sifflent Julia quand le trio, sans broncher, passe à leur hauteur. Pour se faire remarquer, l’un des agresseurs cogne violemment sur une poubelle. «Mon chéri leur a alors calmement et tout simplement dit: «Vous n’avez rien d’autre à faire que de taper sur une poubelle?» témoigne Nicole. Dans sa voix, l’émotion se mêle à la colère et à la révolte.

Claude, Julia et Nicole poursuivent, entendent des pas derrière eux. «L’un d’eux a dit: «T’acharne pas, c’est une famille», se souvient Nicole. Mais un ado leur jette une trottinette. Au passage piéton, un type arrive par-derrière et déséquilibre Claude, pourtant costaud. Les agresseurs le rouent de coups. Il tombe. Alors qu’il gît à terre, ils s’acharnent. L’un des mineurs empoigne la trottinette et la lui balance sur le crâne. Julia crie, essaie de défendre son papa avec l’aide de Nicole. Elles prennent des coups. Une auto passe. Nicole hurle au secours. La voiture ne s’arrête pas.

Paniquée, elle compose le 117. «A la centrale de Lausanne, on m’a passé Rennaz, où on m’a répondu que personne ne pouvait venir nous aider, tous les hommes étant dépêchés ailleurs.» Le porte-parole de la police cantonale, Philippe Jaton, se montre prudent quant à ces déclarations: «Nos effectifs étaient effectivement très occupés cette nuit-là. Mais, d’après le rapport, il est ressorti de la discussion entre la personne de contact et le gendarme qu’il s’agissait de voies de fait (ndlr: injures et bousculade ). Les lésions se sont sans doute aggravées ensuite.» Au bout d’une vingtaine de minutes, les agresseurs quittent enfin les lieux. Claude se relève, sonné, en sang, le crâne ouvert. Des amis arrivés à la rescousse l’emmènent aux urgences.

Pronostic vital engagé

A l’Hôpital de Montreux, l’attente dure. «Un médecin lui a posé trois points, palpé le ventre, et l’a informé qu’il devrait consulter plus tard pour son œil», détaille Nicole. Pas de scanner ni de radios, malgré la violente agression qu’il vient de subir. Des informations que la direction de l’Hôpital Riviera, injoignable hier, n’a pu confirmer. Dimanche soir, la douleur devient trop vive. Claude se rend à l’Hôpital de Monthey. Son pronostic vital engagé, il est placé sous surveillance continue en attendant d’être transféré au CHUV pour y subir une opération sur son visage fracturé. «Je suis offusqué de constater le peu de respect qui règne dans notre société, conclut Claude. J’aimerais voir les choses changer, mais je n’y crois plus.»

24heures.ch (merci à Cretinus Alpestris)

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