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Technologia, le cabinet mandaté par la direction de l’opérateur pour étudier les moyens de sortir de la crise sociale a rendu son rapport d’étape hier matin, ainsi que 107 préconisations. Il estime qu’il faut « réformer profondément la fonction ressources humaines et revoir le système de management ».

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Ce rapport compile les 500 entretiens individuels menés avec des salariés de l’entreprise, à la suite de la vague de suicides de l’automne dernier qui avait frappé l’opérateur historique. Il s’agit en fait d’une étude qualitative après le dépouillement du questionnaire envoyé en octobre aux 102.000 salariés français. Le rapport contient aussi 107 recommandations précises faites à la direction de France Télécom. Interrogé, l’opérateur indiquait ce week-end qu’il ne s’agit là que d’un rapport intermédiaire.

Pour Technologia, la crise sociale est loin d’être terminée. « Il y a eu en effet plusieurs suicides depuis janvier 2010 », note le cabinet en préambule, tout en mettant en avant « la persistance de difficultés ». Selon nos informations, neuf salariés de l’opérateur historique se seraient donné la mort au cours des deux premiers mois de l’année.

« Les salariés attendent aujourd’hui des signes, des symboles et des actes forts » mais « l’obstacle principal à l’efficacité de toutes mesure préventive est le manque de confiance des salariés dans les ressources humaines et la médecine du travail », souligne Technologia. Le cabinet estime donc qu’il faut « renforcer le sentiment d’appartenance des collaborateurs de France Télécom ».

Les réponses au questionnaire d’octobre dernier avaient fait apparaître un profond malaise : seuls 39 % des salariés s’étaient déclarés fiers de travailler chez l’opérateur historique. Technologia recommande aussi de « réformer profondément la fonction ressources humaines et de revoir le système de management et de reporting de façon à le rendre plus simple, plus pertinent et capable de redonner une autonomie minimum aux acteurs de l’entreprise ». Enfin, le cabinet souhaite que l’opérateur mette « en place immédiatement un pôle (national avec déclinaison locale) de compétences pour prévenir les risques psychosociaux, rattaché à la direction ».

Sur le plan de l’organisation, Technologia met en avant « la complexité, voire l’opacité de l’organisation matricielle » de France Télécom, ainsi que « les nombreuses réorganisations sans raison d’être pour les salariés ». Les paroles des salariés pendant les entretiens individuels sont à ce titre éloquentes. « Les orientations, elles changent tout le temps, donc on attend avant de faire les choses. Sinon, on a l’impression de travailler pour rien », déclare l’un d’eux. Ce qui pousse Technologia à demander la clarification « pour chaque salarié de sa place dans l’organisation » : « Mentionnez le nom de votre responsable hiérarchique direct et le nom du service auquel vous appartenez… » Le cabinet s’est aussi intéressé aux « process ». Leur « multiplication est perçue par les salariés comme le signe d’une méfiance de l’entreprise à leur égard », selon les auteurs du rapport.

Chez France Télécom, « on passe plus de temps à remplir des feuilles Excel qu’à faire son travail », dit un salarié, cité dans l’étude. Le système d’information est aussi mis à l’amende. Technologia critique « la prolifération d’applicatifs et leur inadaptation ». « Qu’est-ce qui m’empêche de bien réaliser mon travail ? Clairement, le système d’information », note un salarié. La fixation des objectifs, souvent vus comme étant « trop nombreux, trop élevés et déconnectés de la réalité du travail accompli » est contestée. Technologia estime qu’il faut « limiter le nombre des indicateurs de suivi de l’activité ». Les ressources humaines sont à revoir, pour Technologia, qui pointe du doigt « l’absence d’ouverture de la direction au dialogue, à l’esprit critique et à la réflexion collective ». Le cabinet juge le système de promotion « opaque » et les règles de la mobilité interne, « pas claires ». Selon lui, l’opérateur doit « clarifier les conditions d’accès et d’exercice de chaque poste et les porter à la connaissance des collaborateurs ». Là encore, les mots des salariés sont durs.

« Quand on rencontrait les ressources humaines, cela voulait dire qu’on était candidat au départ », déclare l’un d’entre eux. Enfin, concernant le management, contrairement à ce qui se pratique depuis quatre ans chez France Télécom, Technologia préconise de « limiter la mobilité des managers pour renforcer les collectifs de travail ». Stéphane Richard, directeur général de l’opérateur historique depuis une semaine, doit présenter son projet aux salariés en juin. Il a du pain sur la planche.

Les Échos

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