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Le témoignage terrible d’une libraire vivant et travaillant au Bourget dans un quartier “diversifié”. Isolée, victime de viol, d’agressions à répétition, de menaces de mort, elle garde la tête haute. Un exemple de courage hors du commun qui force l’admiration.

Je suis libraire dans le 93, sur la commune de Le Bourget depuis 1978, soit plus de trente ans à ce jour au service des Bourgetins. Ma boutique se situe dans le centre-ville, près de la gare et de l’Hôtel de Ville. J’ai d’abord tenu cette librairie avec mon père, puis seule depuis sa mort en 1995. J’ai une fille de 22 ans, que j’ai élevée seule. J’ai la réputation d’avoir un caractère peu facile à manier, une personnalité que l’on adore ou que l’on déteste. Etant fille de militaire, il va sans dire que les choses doivent rouler droit, entre politesse, respect mutuel et bonne humeur.

Je suis née à Montreuil en 1957, j’aime donc mon département pour sa diversité et les échanges culturels variés qui se font au gré des conversations. Ceux qui veulent davantage de renseignements sur moi peuvent consulter le site de la boutique dans les rubriques “présentation et blog à part”. Une amie m’a parlé de votre site, que je ne connaissais pas il y a encore quelques semaines. Je vous écris, car j’espère que vous aurez le courage de parler de mon affaire, pour m’aider à briser un mur du silence qui me désespère, et me mine la vie.

Les gros ennuis ont commencé pour moi en janvier 2004, par un braquage à main armée dans ma librairie et une série d’agressions qui ont fait la une du journal “Le Parisien” à cette époque. J’ai eu le « malheur » d’avoir reconnu dans les braqueurs le chef de la bande d’une des cités de la ville, qui n’était même pas masqué, sans doute certain de son impunitié. J’ai déposé plainte.

Le 22 juin 2004, j’ai été agressée dans ma boutique par quatre individus, en plein jour, qui m’ont entraînée de force dans l’arrière-boutique, puis dans mon appartement, situé au-dessus de la librairie. J’ai subi un viol, dont le seul but était de me faire retirer ma plainte du mois de janvier. Faute de preuves jugées suffisantes, le coupable, qui n’a jamais donné le nom de ses complices, bénéficiera d’un non-lieu par le juge d’instruction. Par la suite, on va dénombrer 21 agressions en tout genre avec une séquestration en avril 2007 et une brûlure à l’acide le même mois. (voire l’article de monsieur Yvan Rioufol)

Je vous restitue certaines de ces agressions.

Séquestration en avril 2007

Au moment d’ouvrir ma boutique, par une porte située dans la cour, à 16 heures, deux individus cagoulés me sautent dessus, et me « saucissonnent avec du gros scotch, des genoux jusqu’à la bouche. Je suis transformée en momie, et je commence à étouffer. J’ai la force de me traîner jusqu’à la porte, et de taper avec mes pieds, alertant les passants, qui appellent les policiers, qui me sauvent de justesse. Les enquêteurs me diront que cela ressemble à un contrat, suite à mon témoignage pour le braquage subi en 2004. Les coupables ne seront jamais retrouvés.

Ramadan 2007

Les panneaux publicitaires sur le coté de la boutique affichent une pub jugée indécente par mes voisins du Taxiphone et sa clientèle. Il faut savoir que ce n’est pas moi qui décide de la nature de ces affichages, mais la société inser. Malgré tout, ces images sont jugées, en plein ramadan, provocatrice de la part de ressortissants du quartier.

Un jour, j’ai vu ma boutique envahie par un groupe de femmes musulmanes, qui, venant d’ accompagner les enfants à l’école, me sont tombées dessus, de nouveau à cause de l’affichage, appuyant leurs paroles de menaces physiques et “de me faire tout sauter” pour cause de ramadan.

J’étais terrorisée, mais n’ai pas voulu le montrer. Personne ne va considérer cette intimidation comme un fait important, même si j’ai fait un courrier au commissariat et un mail au Préfet”

Quelques jours après…

Un couple pénètre en la boutique, rien d’extraordinaire, voir normal puisque jour de marché. Ils me demandent le coran. Tout en moi se met à trembler.

Je dis, que je ne fais les livres que sur commande, le plus neutre possible dans ma voix.

« Ah oui, et tu l’as lu le coran toi », me demande l’homme.

« Parcouru monsieur », lui dis-je.

« Parce que si tu arraches pas les filles nues que t’as mises partout, nous on va te le lire et te le faire répéter, tu craches sur le coran en plein ramadan,tu sais ce qu’ on lui fait au mouton ? », poursuit l’homme.

Avec sa femme, ils vocifèrent de plus en plus, je fais pipi sur moi. J’ai si peur, je surveille ses mains, il est si près de moi, le reste se poursuit en arabe, la femme se bouge enfin de la porte, je peux passer telle une anguille, dehors, je me réfugie au café d’à coté je ne dis rien, juste ” un café”. Je me retiens de ne pas pleurer, ne pas dire, j’attends, je leur ai laissé la boutique. Au bout de 5 minutes, je me hasarde, ils sont partis et je reprends mon commerce comme s’il ne s’était rien passé .”

… Encore quelques jours plus tard

“Un bel après midi d’octobre, un dimanche où tout me semble calme et détendu autour de moi…

Au soleil, les vitres de la boutique paraissent totalement crasseuses, méritant une intervention style tornade blanche. Je m’y colle, avec mon sceau, mes chiffons et mes produits, je fais donc le ménage.

Perdue dans mes pensées, je frotte, astique en tout sens, quand soudain, alors que je suis penchée pour tordre la serpillière, des mains me saisissent, me retournent et me collent le long de la vitrine. Mon sang se glace, mon regard se voile, prend du recul et permet à mon instinct de survie de se mettre en place.

Ils sont quatre ou cinq, issus de nulle part. Pourtant, celui qui me maintient, je le connais, c’est celui du “coran” et de sa commande, les femmes arrivent et font ce cri qui leur est propre. Elles s’agrippent à mon pantalon, le tirant vers le bas, tandis que d’autres s’en prennent à mon pull pour le relever. Je sens l’air fendre mon corps, je me débats, me tortille comme une anguille, ce qui facilite mon déshabillage. La haine m’envahit, je ne peux crier, j’en veux à la terre entière de me laisser subir cela, un attroupement s’est formé, seule la langue arabe est usitée. Alors je me mets moi aussi à prononcer des phrases dans cette langue ; j’ignore ce que j’ai dit, je sais juste que papa n’avait jamais voulu me les traduire, mais qu il s’en servait souvent lorsque nous étions à Tanger quand j’étais petite et que nous traversions la ville à pied.

Maintenant , je réalise peu à peu, j’ai froid, peur,et vais me blottir au fond de mon lit. Cette fois, il n’y a pas eu viol, mais nouvelle intimidation, et humiliation. Je n’en suis pas fière, mais je n’ai pas eu le courage d’aller déposer plainte, cette fois.

Ramadan 2008

Pour le ramadan 2008, la méthode a été différente, mais tout aussi nuisible et destructrice. Une personne restait devant ma boutique, et signalait mon « racisme » à l’ensemble de ma clientèle. En panique, j’avais joint le journaliste Ivan Rioufol sur son portable. Voilà ce que je lui ai dit.

Merci d’avoir répondu tout de suite et d’être présent ; je vous joins la photo de la personne qui harcèle ma clientèle depuis vendredi soir en faisant le siège de la boutique et notifiant mon racisme à ma clientèle. Elle me menace de fermeture de mon magasin, de me gazer à la bombe lacrimo si je tente de sortir de la boutique. Nous allons tenter de l’enregistrer, avant toute chose demain, s’il venait à m’arriver quelque chose de grave, c est la seule preuve que j’ai. Merci

Je n’ai pas pu enregistrer la personne pour le moment.

Je suis désemparée et me terre en ma boutique. Il est a noter que je suis la dernière librairie française “

Cette pression a duré quinze jours.

Mes réactions face à ce harcèlement sont très variables ;

– Pour 2007, j’avais fait un courrier par mail à la préfecture :

Monsieur Le Préfet

Je vous informe par le présent émail, des menaces de mort verbales, ainsi que de destruction de mes biens, soit la boutique, par un groupe de femmes musulmanes pour ce jour et divers hommes du voisinage, un jour antérieur.

Motif :

La société “inser” tel, 08 11 65 40 30 touche 1, client 29656, a fait son travail en affichant la promo des magasines de la semaine ; il se trouve que certains ont une classification sexy. L’affichage est décidé au niveau national, je n’ai aucun pouvoir décisionnaire sur lui et me trouve sur le territoire français.

Pour cause de Ramadan, ils m’ interdisent d’afficher, me menacent gravement et m’ordonnent de tout retirer.

Je vous passe les propos, dont certains émis en arabe, ne sont pas compréhensibles pour moi, sauf pour le geste qui consiste à passer le doigt sur la gorge.

Je vous demande donc Monsieur le préfet tout simplement, une aide, pour ne pas subir de nouvelles agressions au nom d’une religion que je respecte, car, j’exerce simplement mon métier.

Recevez monsieur mes sincères salutations »

Pour le Ramadan 2008, je n’ai alerté personne à part le journaliste Ivan Rioufol, avec qui nos échanges ont gardé cette spontanéité et cette fraîcheur sur laquelle je peux compter en toute confiance.

Les pouvoirs publics ne font rien pour moi. Ils jugent sans doute en avoir trop fait pour les agressions antérieures et trouvent plus convenable pour eux de me faire passer pour une déséquilibrée notoire que d’agir.

Le maire de la ville est Monsieur Vincent Capo-Canellas. C’est un proche du maire de Drancy, Jean-Christophe Lagarde, que vous avez épinglé pour sa construction de mosquée municipale, payée par la ville. J’ai eu le tort de soutenir, aux dernières élections municipales, un ami de jeunesse, Gérald Durand, un homme se réclamant des valeurs de la République. Cela a été le prétexte pour le maire de me tourner le dos, conduisant ainsi la police nationale et la police municipale à faire de même. J’ai également commis un autre crime de lèse-majesté en osant faire, en 2006, deux grèves de la faim pour obtenir plus de sécurité, et notamment des caméras, fait relaté par France-info et sur mon site.

Tout ceci m’a conduit à un immense isolement au sain d’une ville qui privilégie “la diversité” au “souchien” ; une ville qui préfère les commerces communautaristes récents, aux vieux commerçants ayant des idées autres et osant les exprimer. Ainsi, en quelques années, les boucheries traditionnelles ont disparu, au profit des boucheries « hallal ». Il n’y a plus de charcuterie, plus de poissonnerie, plus aucun commerce traditionnel dans le centre ville. Par contre, on trouve de la restauration rapide kebab, des pizzas « hallal », et une sandwicherie où le seul jambon qu’on vous serve est du jambon de dinde. Si vous réclamez du jambon de porc, on vous dit d’aller en chercher ailleurs, chez les « Français ».

Je me demande pourquoi le maire pratique ainsi. Faire mettre des contraventions à tous les clients, tous les livreurs, d’une quincaillerie en place depuis 50 ans, n’est-ce pas dans le but ou de plomber ce commerce, ou de le faire partir pour convenances. C’est chose faite, la quincaillerie a déménagé !

Je reste donc, dans ce centre-ville, avec une toute petite boucherie, l’ultime commerçante dans la pure tradition de librairie-presse-papeterie et je sais que l’on va TOUT me faire pour que je cède d’une manière ou d’une autre ; car aujourd’hui je peux affirmer que je suis entrée en résistance.

Je suis malheureuse surtout du changement d’attitude des gamins à mon encontre. Avant 2004, tout allait bien, maintenant, je sens qu’ils ont entendu des choses horribles sur moi, je vois bien qu’ils n’ont plus le même regard quand ils sont dans ma boutique.

Je me sens de plus en plus désespérée, sans perspective. Ce commerce est ma vie, et je sens que je n’aurai pas la paix tant que je n’aurai pas déguerpi. Je suis déjà morte depuis longtemps alors que l’on me laisse exercer mon métier, lui seul m’aide à tenir, c’est si beau les yeux d’un enfant lorsqu’il découvre une histoire, une bande dessinée, une manga, quelque soit la religion de ses parents et sa couleur de peau, ce regard là est toujours empli par le même émerveillement.

Ma drogue à moi, ce sont eux.

Marie-Neige Sardin

Source

Merci à sainte Rita

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