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« En ce moment, je travaille à temps partiel et aujourd’hui, j’ai rendez-vous à l’ANPE.  Je m’y rends pour bénéficier de conseils spécifiques car – chance ! – ma conseillère est compétente. Je vais à l’ANPE en touriste, une fois de temps en temps (je ne touche rien des Assedic). À chaque fois, c’est un voyage dans un autre monde…

Sur le chemin de l’agence, un grand bâtiment est affublé de trois lettres magiques: C.A.F. Cela m’amuse. Pour certains, il doit être bien pratique d’avoir l’ANPE et la CAF côte à côte. Pour peu que la mairie et les ASSEDIC soient dans les parages…

Devant la CAF, une dizaine de personnes de couleur parlent bruyamment. Ils semblent squatter habituellement les abords du bâtiment. Plus surprenant, il y a aussi 2 femmes d’Europe de l’est qui vendent des journaux et mendient.

Quelque mètres encore et j’entre dans l’agence. A l’accueil: une femme de 50 ans, l’air débordée, et dans la file d’attente, 4 personnes devant moi. J’attends mon tour, sagement…

La première personne devant moi est un homme d’environ 30 ans, débraillé et mâchant son chewing-gum. Il ne comprend pas pourquoi l’employeur potentiel ne se déplace pas à l’agence pour le rencontrer. C’est lui qui a besoin de quelqu’un après tout. L’agent d’accueil a bien du mal à lui expliquer pourquoi les allocations chômage ne tombent que pendant un temps limité. « Ici, on a aucun droit » répond le jeune homme. La France est méchante…

Je remarque une offre d’emploi sur le mur. Dans les pré-requis pour obtenir le poste : savoir lire et écrire. Je sais que tout le monde ne sait pas lire ou écrire, mais de là à le préciser dans une annonce ! Je comprends bien vite pourtant la raison de cette indication…

La deuxième personne devant moi est une grosse femme algérienne, la cinquantaine. Sans un bonjour, elle dépose un papier devant l’hotesse d’accueil. Au bout de quelques minutes, celui-ci finit par comprendre que l’autre ne parle pas un mot de français. Et que la bonne femme cherche quelqu’un pour faire à sa place les trucs indiqués dans la lettre.

L’employée a beau lui dire qu’elle doit se prendre en main, qu’elle peut demander de l’aide à sa famille… Peine perdue. L’hôtesse finit par lui photocopier son — maigre — CV, lui inscrire des adresses, lui plier ses papiers, et remplir le dossier de la bonne femme. Bien entendu, pas un merci, pas un au-revoir. Vient ensuite un homme, la quarantaine, pas lavé depuis 2 jours je dirais. Il est perdu au milieu de la paperasserie. Il a besoin de quelqu’un pour lui dire où signer sur les papiers…

40 minutes plus tard (!), je peux enfin dire à l’hôtesse que j’ai rendez-vous avec une conseillère. Comme l’heure du rendez-vous est passée, elle est un peu en rogne mais elle m’est également reconnaissante de ne pas l’avoir alpaguée (comme font certains) pour la presser encore un peu plus.

Elle appelle ma conseillère et lui indique que je suis finalement peu en retard, et que je suis autonome. S’il lui faut signaler ce genre de détail, ce doit vraiment être l’exception. Je faisais déjà office d’extra-terrestre en étant habillé correctement…

Je dois encore patienter un petit quart d’heure pour mon rendez-vous. Sur 10 personnes, je suis le seul blanc . Aux bornes d’informations, des gens glandent et papotent entre eux de sujets sans lien aucun avec le travail.

Une femme asiatique entre précipitamment et se dirige, pratiquement les yeux fermés, vers un petit isoloir avec un téléphone mis à dispo pour appeler un éventuel employeur. Une bonne aide pour ceux qui n’ont pas les moyens. La jeune femme parle à voix basse de fringues, de sorties… En tout, elle reste pendue au téléphone une demi-heure. La combine doit être connue.

Enfin, je rentre chez moi. Je passe devant un femme policière obèse qui fume sur le trottoir en se curant le nez et je prends le métro en évitant soigneusement sur le quai une flaque de pisse.

Civitas Parisorium — partiellement réécrit.

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