24/05/2025
John Tolan, professeur émérite à l’université de Nantes et historien se retrouve au cœur d’une polémique portée par l’extrême droite. Dans une lettre envoyée à deux ministres, il dit son inquiétude pour l’indépendance de la recherche.
En avril dernier, John Tolan, professeur émérite à Nantes Université et historien de renom, s’est retrouvé au cœur d’une polémique lancée dans le journal Le Figaro par Florence Bergeaud-Blackler, chargée de recherches en anthropologie au centre national de la recherche scientifique (CNRS).
Est visé son projet de recherche sur l’influence du Coran dans l’histoire intellectuelle de l’Europe médiévale et moderne – menée en commun avec une trentaine de confrères européens. Selon la chargée de recherches, il est favorable à l’idéologie des Frères musulmans. […]
“Elle s’est livrée à des spéculations saugrenues et à des accusations infondées” , écrit l’historien américain dans une lettre au président et directeur général du CNRS le 10 mai dernier, mettant en copie les ministres de l’Éducation Nationale et de l’enseignement supérieur. […]
Une plainte pour diffamation serait également en passe d’être déposée par l’université nantaise, selon John Tolan. L’historien peut aussi compter sur un appui de la métropole nantaise, qui accueille en ce moment et jusqu’à la fin août une exposition à la médiathèque Jacques Demy de Nantes portant sur le Coran dans l’Europe médiévale. […]
La veille dans le même journal :
Des livres, des objets du quotidien, des tableaux donnent à voir l’apport intellectuel du texte sacré de l’islam dans la société européenne à partir du Moyen Âge, à la médiathèque Jacques-Demy de Nantes (Loire-Atlantique), jusqu’au 31 août.
Ce projet de l’Union européenne vise à souligner les apports du Coran dans les domaines linguistiques, historiques, juridiques. […]
« Cette exposition est aussi un geste citoyen, pour qu’on puisse parler de la place de l’islam dans l’histoire européenne de manière informée et réfléchie, loin des stéréotypes et des débats stériles », souligne John Tolan.
26/04/25
Selon La Croix, quatre historiens – John Tolan (Nantes), Mercedes Garcia-Arenal (Madrid), Roberto Tottoli (Naples) et Jan Loop (Copenhague) – mènent depuis 2019 le projet « EuQu » (« European Qur’an ») pour retracer l’influence du Coran en Europe entre 1150 et 1850. Doté de 9,8 millions d’euros de la bourse Synergy Grant du Conseil européen de la recherche (ERC), le programme court jusqu’au 31 mars 2026 et finance doctorants, expositions (Tunis, Vienne, bientôt Nantes) et un livre collectif attendu le 30 avril.
Les chercheurs estiment que le Coran fut un moteur intellectuel méconnu : après la première traduction latine (1143), il devint un outil théologique utilisé « pour mieux le réfuter » ; en 1543, Martin Luther fit précéder d’une préface une traduction destinée à combattre l’islam et le pape, tandis que le catholique Guillaume Postel soulignait des parallèles avec le protestantisme. « Pour nous, il y a un réel enjeu d’informations pour montrer que l’Europe n’a pas été seulement chrétienne », explique John Tolan, rappelant : « Nous sommes des historiens donc nous réécrivons constamment l’histoire grâce au fruit de nos recherches. »
L’ERC assure que « l’excellence scientifique est le seul critère d’évaluation. » Le montant accordé est « un financement tout à fait standard pour ce type de projet ».
14/04/25
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9 842 534 euros. C’est la contribution attribuée par le Conseil européen de la recherche – organisme créé par la Commission européenne et financé grâce au budget de l’UE – pour « Le Coran européen ». Un projet qui s’inscrit dans le programme de l’UE intitulé « Excellence scientifique », visant à… rattraper le « retard pris dans la course à la production scientifique de pointe et d’excellence » face aux États-Unis ! (…)
Ce projet, également connu sous l’acronyme « EuQu », a débuté le 1er avril 2019 et s’achèvera le 31 mars 2026. Porté par une trentaine de chercheurs d’université espagnols, italiens, néerlandais, hongrois, danois et français (Nantes), il a pour objectif de « découvrir comment le Coran a influencé la culture et la religion en Europe, entre 1150 et 1850 ». Mais sur le site internet créé après l’obtention de la subvention, les responsables sont plus précis : « Notre projet repose sur la conviction que le Coran a joué un rôle important dans la formation de la diversité et de l’identité religieuses de l’Europe au Moyen Âge et au début des Temps modernes, et qu’il continue de le faire. » La volonté de « remettre en question les perceptions traditionnelles du texte coranique et les idées bien établies sur les identités religieuses et culturelles européennes » n’est pas cachée.
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Dès la première présentation publique du projet, John Tolan, professeur d’histoire médiévale à l’université de Nantes – l’un des quatre codirecteurs et sans doute le plus actif – reconnaissait que « parler de Coran européen, c’est un peu une provocation ». Il parlait même de « récidive », après la publication de son livre Mahomet l’Européen, en 2018. Mais s’il est combattu par ce qu’il appelle alors « l’extrême droite », John Tolan est plébiscité par des sphères réputées proches des Frères musulmans.
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