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De la guerre froide à nos jours, l’expansion de l’évangélisme a favorisé l’émergence d’un fondamentalisme chrétien. En trois volets, cette enquête fouillée dévoile les rouages d’une redoutable machine politico-religieuse décidée à étendre son empire sur les consciences. Présent sur tous les continents, le mouvement évangélique, en rapide et constante expansion, compte aujourd’hui quelque 660 millions de fidèles.

S’il réunit différentes Églises, ce protestantisme conservateur reste dominé par un courant fondamentaliste devenu au fil des décennies une redoutable machine politique. Il a contribué à porter au pouvoir, entre autres, Donald Trump et Jair Bolsonaro. Tous deux ont été défaits dans les urnes, mais leur présidence respective a renforcé les liaisons dangereuses entre pouvoir, finances et religion, au service d’un “nationalisme chrétien” de plus en plus offensif.

Remontant au XVIe siècle, aux racines d’un phénomène à la fois omniprésent et méconnu, ce premier volet en retrace la genèse et la mutation décisive qui intervient en 1942, avec la fondation de la National Association of  Evangelicals américaine, qui entend reconquérir la société. Avec la guerre froide, le prédicateur Billy Graham va donner à cet objectif un formidable élan. Sillonnant le globe au fil de “croisades” anticommunistes d’évangélisation, il galvanise des meetings géants au service des présidents conservateurs, d’Eisenhower à Nixon. Opposé à la ségrégation, il se tient pourtant à l’écart du mouvement pour les droits civiques emmené par Martin Luther King. Après le Watergate, il se retire de la politique intérieure pour se consacrer au reste du monde, visitant au total 185 pays. Dans son sillage, la dynamique d’expansion se poursuit et les “méga-églises” se multiplient en Corée du Sud, au Brésil ou au Nigeria, où de nouveaux leaders religieux vont récolter ce qu’il a semé.

Réveil des nationalismes chrétiens

Devant la multiplication des signaux d’alarme, l’Alliance évangélique mondiale a fini par condamner, en 2021, la montée de ce “nationalisme chrétien” de combat, et sa collusion avec les partis d’extrême droite. Mais en juin 2022, l’annulation par la Cour suprême des États-Unis de l’arrêt Roe vs Wade, garantissant le droit à l’avortement, a offert au fondamentalisme évangélique une nouvelle victoire. Tournée sur plusieurs années et dans plusieurs pays (États-Unis, Brésil, Corée du Sud, République démocratique du Congo et France, dans la “méga-église” Martin-Luther-King de Créteil), la passionnante enquête de Thomas Johnson réunit analyses de spécialistes et témoignages d’une multiplicité de fidèles et de leaders du mouvement. Beaucoup d’entre eux, comme la pasteure Paula White, qui dirigeait à la Maison-Blanche le conseil évangélique chargé de prier pour Donald Trump et le protéger des “forces du mal”, ou Michele Bachmann, égérie du Tea Party, ex-députée américaine, aujourd’hui à la tête de l’une des richissimes universités évangéliques qui fleurissent aux États-Unis, assènent en souriant de stupéfiantes contre-vérités. D’autres chrétiens, comme le “repenti” Robert Schenck, Jerushah Duford, la petite-fille de Billy Graham, ou le prix Nobel de la paix Denis Mukwege, ont rejoint les rangs de ceux qui luttent contre la propagation de la haine, qu’elle vise des femmes désirant avorter ou qu’elle relaie le battage des suprémacistes blancs.

Fourmillant d’archives inédites et d’incursions dans les célébrations géantes de l’évangélisme, la série révèle les rouages financiers, politiques et médiatiques d’une idéologie religieuse décidée à étendre son empire sur les consciences. Série documentaire de Thomas Johnson (France/États-Unis, 2023, 53mn)

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