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L’unanimité du soutien au mouvement « Femme, vie, liberté » né en Iran face aux mollahs ne saurait cacher les remous au sein des réseaux féministes, affirme Corinne Narassiguin, secrétaire nationale à la coordination du PS, dans une tribune au « Monde ».

Ce qui se passe en Iran est extraordinaire. Le meurtre de Mahsa Amini, le 16 septembre, pour un voile mal ajusté a soulevé un mouvement irrépressible, malgré la répression violente du régime. Le courage des femmes iraniennes qui se battent pour le droit de vivre libres et celui des hommes iraniens qui les accompagnent soulèvent un incroyable espoir pour celles et ceux – surtout celles – qui vivent sous le joug des dictatures islamistes.

Pourtant, l’unanimité du soutien des féministes et humanistes au mouvement « Femme, vie, liberté » ne cache pas les remous au sein des réseaux féministes. Le débat est entre celles et ceux qui défendent la liberté des femmes contre l’intégrisme islamiste et celles et ceux qui défendent le droit des femmes de porter le voile. Cette différence ne mérite pas les caricatures opposant le camp des républicains démocrates au grand retour des « islamo-gauchistes ». Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Des influenceuses « voile » sur les réseaux sociaux

Pourtant, ce débat doit avoir lieu, il est nécessaire. Je le dis clairement : défendre le droit de porter le voile n’est pas un combat féministe. J’imagine déjà les polémiques : une dirigeante socialiste négociatrice de l’accord ayant créé la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) attaque certains de ses camarades écologistes et « insoumis ». Mais c’est parce que je sais le danger de la thèse des gauches irréconciliables que je veux aller au bout de ce débat. Pour faire grandir et renforcer l’union, on ne peut pas mettre nos divergences sous le tapis et les y laisser pourrir. Examinons-les pour les dépasser.

Faire des choix

Je comprends et partage les inquiétudes de mes camarades de la gauche et de l’écologie concernant les amalgames entre islam et islamisme, entre musulmans et terroristes, véhiculés par l’extrême droite et une partie de la droite. J’entends quelles bonnes intentions animent le soutien d’une partie d’entre eux aux femmes musulmanes qui portent le voile. Mais je crois qu’ils se trompent de combat. La journaliste iranienne Masih Alinejad l’explique mieux que moi : ceux qui nourrissent la phobie – c’est-à-dire la peur irrationnelle – de l’islam, ce sont les islamistes, pas ceux qui combattent l’islamisme. Lire aussi Article réservé à nos abonnés Le jour où la France s’est divisée sur le foulard

Dans toutes les dictatures islamistes, le voile n’est pas un accessoire vestimentaire mais un instrument d’oppression des femmes, symbole du contrôle absolu des hommes sur leurs corps et sur leurs vies. La France est une république démocratique laïque. La liberté religieuse y est garantie, les femmes musulmanes ont le droit de porter le voile, et je défendrai toujours ce droit. Au nom de la laïcité. Jamais au nom du féminisme. C’est le même principe de laïcité qui s’applique à travers l’interdiction des signes religieux ostensibles dans les écoles, les collèges et les lycées publics. Celles et ceux qui utilisent le mot « islamophobie » sont prompts à qualifier cette loi de liberticide. C’est tout le contraire. La laïcité, c’est la liberté. Liberté de croire ou de ne pas croire. L’école de la République doit être un lieu où l’on apprend à penser par soi-même, à se construire en tant qu’individu libre, hors des pressions de son milieu social et familial. Pour pouvoir faire, ensuite, des choix d’adulte véritablement libres, y compris le choix de porter le voile.

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Le Monde

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