Fdesouche

2008

Les années, 2008, chez Gallimard

2017 :

Touche pas à ma raciste ! (ces intellectuels qui soutiennent Houria Bouteldja)

Par Jack Dion
Publié le 20/06/2017 à 13:27

Dans sa recension, fort logiquement, Jean Birnbaum relevait le rôle notable de Houria Bouteldja, égérie des « Indigènes de la République », auteure du livre Les Blancs, les Juifs et nous, où elle franchit la ligne jaune du racisme, de l’antisémitisme et de l’homophobie avec une maestria qui n’a d’égale que la prétention de sa logorrhée. C’était le nom à ne pas citer. On ne touche pas à Houria Bouteldja sans riposte immédiate.

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Moralité : de même qu’il y a le bon et le mauvais cholestérol, il y a le bon et le mauvais racisme.

* Ludivine Bantigny (historienne), Maxime Benatouil (co-président de l’Union juive française pour la paix), Judith Bernard (metteure en scène et journaliste), Déborah Cohen (historienne), Thomas Coutrot (économiste), Christine Delphy (sociologue et militante féministe), Annie Ernaux (écrivaine), Fabrice Flipo (philosophe), Isabelle Garo (philosophe), Eric Hazan (éditeur et écrivain), Stathis Kouvelakis (philosophe), Philippe Marlière (politiste), Dominique Natanson (co-président de l’Union juive française pour la paix), Olivier Neveux (universitaire), Ugo Palheta (sociologue), Geneviève Rail (universitaire, Simone de Beauvoir Institute and Womens Studies, Canada), Catherine Samary (économiste), Michèle Sibony (Union juive française pour la paix), Isabelle Stengers (philosophe), Julien Théry (historien), Rémy Toulouse (éditeur).

Marianne

Mars 2022

L’écrivaine, soutien de Jean-Luc Mélenchon, ne conçoit ni l’écriture ni l’existence sans engagement. Emmanuel Macron, mépris de classe, banlieue, livres, féminisme: l’action politique fait partie de moi, dit-elle.

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L’écrivaine, professeure de formation, est l’une des références du féminisme français. Depuis les années 70, elle raconte le monde qui l’entoure au travers de sa propre expérience de «fille, s’étant heurtée au mépris social et à la domination masculine». On l’a rencontrée pour discuter de politique, de gauche et à la vérité, de tout. Elle fut longtemps connotée autrice misérabiliste, renvoyée de fait à son enfance modeste à Yvetot, en Normandie. Avant d’acquérir un trône littéraire et une stature internationale. A 81 ans, elle a un pied enfourné dans chaque époque. Annie Ernaux est à la fois une mémoire unique de luttes passées, comme elle est une source d’inspiration pour des militants du moment – sur le genre, les classes sociales, l’égalité.

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Entre autres, c’était un bon prétexte. Mais allons-y. Pourquoi avez-vous décidé d’intégrer son parlement populaire qui regroupe des personnalités du monde associatif, syndical, intellectuel et artistique ?

L’action politique fait partie de moi, même quand je ne la rends pas publique. En 2012, j’avais écrit une longue tribune dans le Monde en soutien à François Hollande pour le second tour. Mais c’est différent. Mélenchon, ça fera trois fois que je voterai pour lui au premier tour. Je n’ai donc pas fait de saut formidable. Dans son programme, que j’ai lu attentivement, il y a des propositions qui me paraissent essentielles. L’idée de collectif, le rétablissement de l’impôt sur la fortune (ISF), le partage des richesses, l’organisation du travail. Et il y a plus que tout cette fameuse mesure de changer de république. (Elle élève la voix.) Je ne veux plus de cette putain d’élection présidentielle ! Je vote depuis 1962. C’était la première fois, j’avais 21 ans. C’était un référendum. De Gaulle posait la question : «Est-ce que vous voulez qu’on élise le président au suffrage universel ?» Et j’avais voté non. Mélenchon souffre parfois d’avoir pété un câble. (Elle rit.) Mais, globalement, je vois un homme cultivé, avec une vision de l’histoire et ressenti comme quelqu’un de solide. Mais je ne suis pas objective : je ne suis entourée que de gens qui votent pour lui.

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Assumez-vous cette formule «d’écrivaine engagée» ?

J’assume ce terme. J’ai vécu ma jeunesse au milieu d’écrivains engagés. Sartre, Beauvoir, Camus, qui n’était pas si désengagé que ça. J’ai connu Mai 68 aussi. Je constate, et déplore peu à peu, le désengagement des écrivains. Et du coup, comment dire ? J’estime que c’est un devoir de prendre position. Même si je peux me tromper, j’ai envie de témoigner. J’ai un regard sur le monde social et les femmes, deux directions, deux douleurs, qui correspondent à ma biographie – j’ai vécu le mépris social et me suis heurtée, en tant que fille, à la domination masculine. Aujourd’hui, c’est très difficile de gagner sa vie en écrivant des livres. Les écrivains, s’ils se positionnent, ont peur de perdre des lecteurs, de moins en vendre. On peut le comprendre, mais à mon sens, c’est une erreur.

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Ce quinquennat est une accumulation d’annonces et de grandes messes. Macron a tout de même montré quelques qualités je crois, mais je ne souhaite pas un second mandat avec lui, qui, je pense, ne serait pas calme. Le problème, c’est qu’en face… il y a l’embarras du choix dans le pire. J’en vois trois, avec Pécresse, Le Pen et Zemmour en tête. A propos du dernier, il est difficile de comprendre les raisons de sa popularité. On est surinformés. Est-ce que cette popularité correspond à la réalité ? Qui le sait ? C’est très compliqué de savoir, de prendre le pouls de la société sur le moment.

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Des personnalités de droite vous ont-elles déjà impressionnée ?

A part Simone Veil, je ne vois pas – elle était vraiment de droite. Je reconnais que certaines personnalités peuvent avoir un regard pertinent ou prendre de bonnes mesures, comme Jacques Chirac en 2003, opposé à la guerre en Irak. Mais impressionnée, non. J’ai par contre été impressionnée par des personnalités de gauche dans lesquelles je ne me reconnais plus du tout, comme Jean-Pierre Chevènement.

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Certains mots comme «wokisme» se sont imposés dans le débat public. Comment vous les appropriez-vous ?

Je le prends dans son sens initial. Woke, c’est-à-dire «réveil» et «éveil» à tout ce qui est humainement injuste, des conditions faites aux femmes ou encore aux personnes racisées. Je ne comprends pas comment ceux qui l’érigent en menace l’entendent. Qu’est-ce qu’ils reprochent à une prise de conscience d’injustices ? Ce mot qui est stigmatisé, stigmatise ceux qui le portent, si tant est qu’ils ne le soient pas déjà. Vous vous souvenez du colloque organisé en janvier à la Sorbonne par des réactionnaires ? Je trouve honteux qu’un ministre de l’Education puisse participer à ce genre d’événement.

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Je ne pense pas qu’il y ait eu un moment où l’on se soit dit «nous sommes heureux». C’est très subjectif comme question. Elle est liée à l’âge, à l’atmosphère. Moi, j’ai seulement un souvenir de l’époque que j’ai trouvée la plus intéressante à vivre. C’est 1968 et ce qui a suivi, je dirais jusqu’en 1975, malgré la crise pétrolière de 1973. Il ne s’agit pas seulement d’idées nouvelles et d’une nouvelle conception de la liberté avec la loi Veil. Il y avait ce sentiment de pouvoir acheter des choses très concrètes. Un lave-vaisselle, par exemple. Mon mari et moi avions changé de télé en noir et blanc pour en prendre une en couleur.

On pourrait élargir la période au tout début des années 80. Le TGV est arrivé, François Mitterrand aussi, en dépit du désenchantement qui a suivi. J’ai l’impression qu’on faisait plus «nation». Et puis, personnellement, je suis arrivée dans une ville nouvelle en 1975, Cergy-Pontoise. Un chantier total, puisque c’était de la boue. Des gens s’installaient là, avec un élan. C’est idiot de dire ça, mais il y avait un avenir, une certitude que se construisait ce qui n’avait jamais été fait.

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Rien n’est plus énervant que d’être traité de «boomer». C’est une idée reçue : on accuse la population d’avoir voulu être heureuse. Tout le monde veut être heureux, non ? Ce sont les politiques qui ont mis les Français là où ils sont aujourd’hui. Je me souviens de Lionel Jospin en 2002 qui a déclaré, à la présidentielle : «Mon projet n’est pas socialiste.» Carrément ! Il est quoi son projet ? Bon, je n’avais pas voté Jospin, mais pour Arlette Laguiller. (La voix monte d’un cran.) Et, évidemment, c’était de notre faute après ça : on a fait perdre la gauche à cause de Laguiller et Taubira ? En réalité, il y a eu ce tournant où les socialistes ont perdu l’idéal de gauche, celui de vouloir élever l’ensemble de la société.

Le mot «gauche» a-t-il encore un sens ?

Pour moi, oui. C’est une affaire de «longueur de vie» – j’ai connu une gauche qui pouvait s’allier avec un Parti communiste très fort à une certaine époque. Le mot «gauche» porte l’émancipation et l’espérance, un idéal tourné vers le futur. La politique, ce n’est pas la suppression, mais la création. Emmanuel Macron ne masquait pas sa fierté après la suppression de la taxe d’habitation. Mais ce n’est pas un nouveau droit. J’aurais pu hésiter entre Mélenchon et Sandrine Rousseau. Mais pas les autres. J’ai souvent écouté Yannick Jadot, mais je ne lui pardonnerai pas de s’être rendu à cette manifestation de policiers factieux devant l’Assemblée nationale. (Elle fait des grands gestes de la main.) Jamais ! Et c’est pareil pour Fabien Roussel… qui est communiste comme moi je suis religieuse.

Est-ce qu’il y a des luttes que vous avez découvertes ?

Je découvre un peu tous les jours. Ou bien je redécouvre, comme l’écoféminisme, que j’ai connu et qui avait été un peu oublié. Au fond, ce sont les questions autour du féminisme et du genre qui continuent de me bousculer. Ce désir de se faire appeler «iel» est bien loin de ma jeunesse. Mais j’ai toujours une curiosité à l’égard des idées et des mouvements qui changent la société. Ce n’est même pas une volonté, c’est un tropisme. Je lis pas mal sur Internet et me surprends à suivre l’actualité heure par heure. Je suis abonnée à des médias sur mon smartphone. Et quand je les reçois à la maison par la Poste, je sais déjà tout. Cela dit, il y a encore pour moi le plaisir du papier. Je n’aime pas lire les longs textes sur Internet. Il n’y a pas de difformité dans un papier. Vous êtes face à une chose matérielle, c’est vachement important. J’avais une liseuse, que j’ai rangée : j’avais l’impression que tout ce que j’y lisais se ressemblait.

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Libération

Chercheurs et artistes, dont Patrick Chamoiseau, Virginie Despentes ou encore Annie Ernaux, soutiennent les exilés qui occupent l’université Paris-8 depuis le 30 janvier et dénoncent le projet de loi Asile et immigration du gouvernement.

par Un collectif de critiques d’art, de personnalités artistiques et civiles

publié le 5 février 2018 à 16h58

Signataires : Gwenaëlle Aubry, Patrick Chamoiseau, Virginie Despentes, Annie Ernaux, Eric Fassin, Odile Henry, Valérie Osouf, Raoul Peck, Thomas Piketty, Zahia Rahmani, Gisèle Sapiro.

Alors que le gouvernement s’apprête à faire voter une loi inique sur les conditions de l’asile, nous, chercheur.e.s, écrivain.e.s, artistes, exprimons notre plein soutien aux revendications des exilé.e.s qui occupent depuis le 30 janvier des salles de l’université Paris 8 pour faire entendre leur protestation contre les politiques migratoires européennes et en particulier françaises.

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Libération

Guerres et terrorisme : sortir du déni

TRIBUNE. Le lien entre les interventions militaires occidentales et certains attentats n’est jamais interrogé, déplore ce texte signé notamment par Virginie Despentes, Adèle Haenel, Annie Ernaux, Jean-François Bayart et Alexis Jenni.
Publié le 14 novembre 2020 à 12h00 · Mis à jour le 16 novembre 2020 à 10h23

Il ne fait pas bon avancer quelques arguments posés au pays de la liberté d’expression. Celle-ci est brandie à cor et à cris par ceux-là mêmes qui, dans le même temps, stigmatisent, injurient, intimident et menacent quiconque tenterait d’éclairer sous un jour différent la situation terrible que nous traversons.

Cette situation, qui a vu se succéder plusieurs assassinats abjects faits pour nous épouvanter, est de fait épouvantable. Mais au-delà de l’épouvante, il ne faudrait rien dire : aux yeux de ces détracteurs, les attentats commis par des terroristes fanatiques ne mériteraient aucune autre explication que cette tautologie : ils sont commis par des terroristes fanatiques. Toute personne proposant des éléments d’analyse et de compréhension est aussitôt vouée aux gémonies sur les réseaux sociaux, par des commentateurs et dans certains journaux qui se repaissent des attentats pour achalander leur boutique raciste et fourbir leurs appels à la guerre comme au choc de civilisations.

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Les guerres menées par notre pays sont soit passées sous silence soit glorifiées. Les chefs d’État successifs qui en décident sans aucune validation démocratique aiment s’afficher en chefs de guerre. Sans aucune validation démocratique en effet, puisque c’est là le fait du prince, comme le veulent les institutions de la Ve République. Le Parlement, qui n’a déjà pas beaucoup de pouvoir en général, n’a qu’à se taire. Se taire : c’est l’essentiel de ce qui se passe sur ces guerres.

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Tous montrent non seulement bien sûr la violence inhérente à ces opérations militaires mais en outre leur absolue inefficacité quant aux finalités dont elles sont officiellement dotées lorsqu’elles se désignent comme « guerres antiterroristes ». Nombre de ces analyses avancent que le phénomène est celui du « pompier pyromane » : loin de combattre le terrorisme, il l’alimente en nourrissant le ressentiment.

Nouvel Obs

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