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Ilyès (1) n’a jamais connu la guerre. Pourtant, elle a toujours fait partie de son intimité, des lettres de généraux accrochées sur les murs du salon jusqu’aux fusils oubliés dans les recoins de la maison de ses aïeux. Les récits familiaux sur la période de «libération» de l’Algérie ont bercé son enfance, puis son adolescence. «C’est un peu comme un tableau que tu vois tous les jours… Tu n’y prêtes même plus attention, mais au fond de toi, tu sais qu’il est là», décrit le Franco-Algérien de 26 ans, qui vit aujourd’hui à Perpignan (Pyrénées-Orientales). Lorsqu’il évoque son rapport à cette guerre, il se remémore les «séquelles psychologiques» de son grand-père, ancien combattant de la libération nationale, retenu en captivité pendant plusieurs années par l’armée française. «La nuit, dès qu’il fermait l’œil, il se mettait à hurler. En tant qu’enfants et petits-enfants, on a dû apprendre à vivre avec ça.»

« On ne m’a pas tout dit d’un coup »

La période coloniale et la guerre d’Algérie (1954-1962) ont laissé des traces durables au sein de la société algérienne, mais aussi française. Environ 39% des jeunes Français de 18 à 25 ans ont aujourd’hui un membre de leur famille concerné par cette histoire, selon les estimations de Paul Max Morin (2), chercheur au Centre de recherches politiques de Sciences Po. Sur la base d’une enquête menée auprès de 3 000 jeunes et d’une centaine d’entretiens avec des petits-enfants d’appelés, de pieds-noirs, de harkis, de juifs d’Algérie, de militants au Front de libération nationale (FLN) et à l’Organisation armée secrète, l’enseignant décrit la manière dont la nouvelle génération interprète, négocie et utilise cet héritage au quotidien : «La plupart d’entre eux savent finalement assez peu de choses sur ce passé. C’est encore plus le cas dans les familles de Français d’origine algérienne, au sein desquelles on a très peu relaté ces événements, en raison de l’humiliation subie lors de la guerre, du racisme ou des barrières de la langue. Deux catégories de jeunes ont développé un plus grand intérêt pour cette histoire : les descendants et les politisés, que ce soit à droite ou à gauche.»

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Libération

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