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Une polémique est venue ternir la dernière édition du Salon du livre de l’Estrie (SLE), alors que la poète d’origine libanaise Emné Nasereddine affirme avoir reçu des questions qu’elle juge racistes de la part d’un autre auteur, l’historien Martin Fournier.

Dans une longue publication Facebook, l’écrivaine de 31 ans souligne que les questions soulevées par M. Fournier alors qu’elle donnait une conférence avec la psychologue Nathalie Plaat étaient un « piège qu’il [lui] tendait ». 

Notons d’emblée que Mme Nasereddine a refusé de commenter l’incident à La Tribune.

« Il revient de France avec sa femme et est choqué par le nombre de femmes arabes musulmanes qu’il a vu à Bordeaux. Il me dit, qu’en pensez-vous? Quelle place occupe la femme musulmane dans l’espace public ? », confie l’autrice sur Facebook.

Toujours selon sa version des faits, Martin Fournier l’aurait ensuite rejointe à sa table de dédicaces. Il aurait poussé les livres de l’autrice et posé ses fesses sur la table, avant de continuer d’interroger la poète sur les femmes musulmanes. 

« Ce geste [lorsqu’il s’assoit sur la table] m’est d’une violence. Bizarrement, ma vision se trouble. Il dit, vous n’avez pas répondu à ma question. J’aimerais savoir. J’ai besoin de comprendre. Je vois les femmes en Afghanistan. Les femmes de votre famille, pourquoi portent-elles le voile ? C’est pour ne pas séduire ? Comment disposez-vous de votre corps ? », avoue Emné Nasereddine sur son mur Facebook.

Elle confie avoir pleuré après les événements. Elle précise qu’elle est déçue, car elle s’attendait à être dans un « safe space » au SLE. « […] je n’ai pas eu le courage de lui dire, monsieur, vos paroles m’agressent. C’est du racisme. Je vous trouve violent. J’avais peur qu’en lui disant ça, ce soit moi que l’on trouve violente. Dérangeante. »

Martin Fournier se défend

Devant ces accusations, Martin Fournier a lui aussi tenu à donner sa version des faits sur Facebook. Il qualifie entre autres son intervention de maladroite.

« J’ai blessé une autrice libanaise à qui j’ai posé deux questions polies sur le sujet sensible des femmes musulmanes, parce que j’essaie d’écrire de brefs commentaires intelligents, sensibles et respectueux sur ce sujet dans un manuscrit en cours de rédaction. Je cherchais à me renseigner, sans intention malveillante. Or, ce sujet est encore plus sensible que je le croyais », écrit-il.

Il assure avoir envoyé un mot d’excuse à l’éditeur de Mme Nasereddine, dans lequel il précise qu’il aurait aimé pouvoir exprimer ses regrets en personne.

« Je suis sincèrement désolé que les questions que j’ai posées à Emné Nasereddine sur les femmes musulmanes lui aient causé peine et souffrance. Ce n’était pas le lieu pour faire ces interventions et j’aurais dû m’effacer devant son trouble manifeste. J’ai été maladroit et je m’en excuse, car mon intention était tout autre », peut-on lire dans sa lettre.

Martin Fournier n’a pas non plus retourné la demande d’entrevue de La Tribune.

Réactions du SLE

La direction Salon du livre de l’Estrie n’a pas voulu revenir sur les événements à La Tribune, mais, signe de l’époque, l’événement a lui aussi rebondi sur Facebook.

« Devant cette situation impliquant deux personnes invitées comme tête d’affiche, le Salon a immédiatement réagi en adressant ses excuses à l’autrice, en lui offrant son soutien et en effectuant des suivis avec les deux parties », explique d’entrée de jeu le SLE.

« […] nous tenons à rappeler que Le Salon du livre de l’Estrie se veut un espace d’échanges et de partages qui soit sécuritaire pour les personnes qui y participent et y collaborent. Il nous importe de préserver et de protéger toutes les voix, notamment celles de la diversité. Cette réflexion était déjà au cœur de nos préoccupations et cet incident, bien qu’isolé, nous rappelle l’importance d’agir rapidement, en renforçant nos mécanismes de protection […] », poursuit-on.

Soulignons que Mme Nasereddine et M. Fournier étaient deux auteurs en vedette au SLE, la première pour la parution de son premier livre La danse du figuier et le deuxième pour la continuation de sa série Les aventures de Radisson.

La Tribune

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