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Guilluy : "Le contrôle de l'immigration n'est pas qu'une demande de l'extrême-droite"

Christophe Guilluy : « Dans un pays multiculturel, chacun se demande s’il est en voie de “minorisation” dans son coin » (MàJ)

15/10/2021

La majorité est de fait une puissance d’inertie, c’est un bloc. On ne peut pas penser les nations avec les catégories de Netflix, c’est-à-dire en panélisant la société, en la divisant en tribus, par affinités culturelles, comme le font les scénaristes de Netflix quand ils produisent pour des segments marketing de téléspectateurs. Cette idée que tout est morcelé, que la France serait un “archipel”, empêche de généraliser, et donc de comprendre. Conceptualiser, c’est généraliser. L’approche sociologique des fractures françaises, c’est une chose : mais nier le bloc politique que constituent des gens ordinaires, c’est noyer le poisson. A un moment, il faut donner du sens. Même pour nous, pour notre santé mentale. La politique crève de l’absence de projets.

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Il n’y a pas de projet, de mouvement, de sens. Il n’y a rien. Finalement, cette vision “netflixisée” permet d’occulter la question centrale des classes moyennes occidentales, qui demeure “l’éléphant dans la pièce”. Pour moi, la maison mère du narratif politique en Occident, c’est Netflix, à Los Angeles. [Rires.] D’ailleurs, après son stage de formation à la Maison-Blanche, Barack Obama a rejoint Netflix. Et peut-être un jour Emmanuel Macron ? Aujourd’hui, c’est Hollywood qui donne le la de la politique intérieure des nations occidentales. 


11/10/2021

On ne le présente plus : Christophe Guilluy, géographe, inventeur du concept de “France périphérique” revient pour L’Express sur les questions qui animent le débat et la conversation publique en ce début fou de campagne présidentielle. Sur l’immigration, dont il rappelle qu’elle ne saurait se résumer à une question ethnique – “la réduction des flux est une demande de Français de toutes origines” -, il préconise une approche pragmatique : “certains quartiers sont devenus des sas, où l’on ne reste pas. Il faut y laisser les habitants vieillir. Quand on aura des petits vieux qui tapent le carton en bas des tours, la donne changera”.

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Votre approche de l’immigration est assez déconnectée de la question ethnique. Vous faites valoir que ce n’est pas une crainte de “petits Blancs”, mais une angoisse universelle, face à un environnement qui change…

Quand j’ai ciselé la notion d'”insécurité culturelle”, l’idée était de forger un concept opérationnel, concret, pour analyser les dynamiques de peuplement dans le logement social. Un bailleur social me demandait d’enquêter sur les raisons pour lesquelles dans des quartiers sans insécurité “physique”, de nombreux habitants et notamment des retraités et des familles d’origine maghrébine en phase d’ascension sociale demandaient à être relogés ailleurs. Le point commun était que dans ces quartiers il y avait à ce moment-là une forte immigration subsaharienne, donc une culture différente encore. En fait, quelles que soient leurs origines, les gens perçoivent bien la logique démographique : ils ressentent parfaitement que dans un modèle multiculturel, où toutes les cultures continuent de faire valoir leurs normes, chacun se demande s’il est en voie de “minorisation” dans son quartier ou dans sa ville. C’est logique : quand l’autre ne devient pas soi, on essaie de compter “combien est l’autre”. Tout simplement parce que quand son propre mode de vie devient minoritaire, c’est plus compliqué à gérer au quotidien. Tout cela se fait la plupart du temps dans un contexte non violent : c’est un contexte de réorganisation presque anthropologique.

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