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Tania de Montaigne imagine dans sa chronique dans Libération un voisin, appelons-le E., qui, chaque jour, ouvre sa fenêtre et dit tout ce qui lui passe par la tête. Dans la grammaire de E., toutes les phrases commencent par : c’était mieux avant, un «avant» qui renvoie à une époque où les gens étaient tous blonds avec des yeux bleus.

Ce qu’il aime c’est donner son avis même, et surtout, s’il n’y connaît rien. Un peu comme si E., bien qu’étant adulte, n’avait pas complètement dépassé le stade anal, qui se situe approximativement vers l’âge de 3 ans. Stade où on éprouve une gigantesque jubilation à l’idée de dire tout ce qui nous vient sans restrictions, surtout si ça parle d’excréments. A cet âge-là, on est fasciné par la merde et tous ses corollaires. On dit «caca», «popo», «cucul», «prout», et c’est la joie. Dans le cas de E., ça donne des phrases comme : «Les noirs, c’est tous des voleurs», «remettons les filles à la cuisine» ou «les hommes c’est plus ce que c’était, avant ils ne se comportaient pas comme des femmes, ils en avaient dans le pantalon». Ou bien encore : «Les prénoms c’était mieux avant, moi j’vois j’avais une copine, elle s’appelait Corinne, et j’peux te dire que c’était quand même autre chose.»

Dans la grammaire de E., toutes les phrases commencent par : c’était mieux avant, un «avant» qui renvoie à une époque où les gens étaient blonds avec des yeux bleus et s’appelaient tous Corinne ou Pierre ou Paul, à la rigueur Jacques. […]

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