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Avant de parler de sécession de cette majorité (je préfère d’ailleurs parler d’autonomisation), il faut revenir en arrière, aux années 1980, et au processus de sécession des élites que l’historien américain Christopher Lasch avait diagnostiqué. C’est cette sécession non pas seulement des élites mais des catégories supérieures qui provoque l’autonomisation des gens ordinaires. C’est donc la sécession du haut qui provoque celle du bas pas l’inverse. En abandonnant le bien commun, en validant un modèle économique et sociétal qui n’intègre pas ou peu les gens ordinaires, le monde politique s’est déconnecté de la société elle-même.

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Ce qui est frappant c’est la solidité du diagnostic des classes populaires sur les questions du travail, des services publics et de l’immigration ; une solidité qui révèle a contrario la versatilité des élites sur tous ces sujets. Ces protestations agissent comme des coups de butoirs, la digue idéologique ne cède pas encore mais se fragilise. En 2018, soutenus au départ par 80 % de l’opinion, quelques Français habillés de jaune ont fait trembler le pouvoir ; aujourd’hui ce sont 30 millions de Français qui expriment leur désaveu, ce silence bruyant, cette colère sourde créée un immense malaise, elle est explosive car on sait que demain ces millions de Français ne vont pas disparaître et exprimeront à nouveau cette colère dans les urnes ou dans la rue.

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Après trente ans de recomposition économique, sociale et culturelle, tout s’est inversé. Aujourd’hui les deux Français sur trois se retrouvent dans l’abstention, la contestation d’un modèle qui ne les intègre ni économiquement ni culturellement. À l’occasion de cette élection, l’erreur serait de croire à un retour du monde ancien. La réalité du XXIe siècle est incontournable, aujourd’hui la majorité de ce qu’on appelait hier la classe moyenne est fragilisée, désaffiliée, notamment son socle populaire. Les vieux partis s’en sortent grâce aux héritiers des Trente Glorieuses, et encore: les chiffres montrent qu’en stock, LR et le PS ont attiré moins de voix en 2021 qu’en 2015. De plus, et si on fait un peu de prospective, le destin de ces vieux partis est inscrit dans la pyramide des âges de leur électorat. Les «survotants» ayant plus de 70 ans, sans un renouvellement de leur sociologie, ces partis sont condamnés à terme.

Le Figaro

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