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Des universitaires membres de Vigilance Universités expliquent en quoi le concept d’« islamophobie » est selon eux trop ambigu et flou pour être réutilisé scientifiquement.

Dans les derniers mois, plusieurs fois la question de la légitimité du terme « islamophobie » a été posée comme si elle pouvait être tranchée par un argument d’autorité, et plus précisément d’autorité universitaire. Le fait que des universitaires utilisent ce terme prouverait qu’il est légitime et que, par conséquent, ceux qui critiquent son usage dans la vie publique (dans les discours politiques, les médias ou les titres de manifestations publiques) sont des individus peu recommandables, qui ne peuvent pas, quoi qu’ils en disent, être de vrais et sincères antiracistes. Voilà globalement ce que disent ou laissent entendre ceux qui prétendent s’appuyer ainsi sur l’autorité de l’université pour valider la nouvelle cible qu’ils veulent donner à la lutte antiraciste : l’islamophobie. Affrontons donc sans détour cet argument.

L’université peut-elle justifier l’emploi du terme « islamophobie » dans la vie publique ? En d’autres termes, est-ce que l’utilisation du terme d’islamophobie par un certain nombre d’universitaires peut cautionner l’emploi de ce terme dans les médias ou les discours politiques ? La réponse est simple et sans ambiguïté, et elle s’impose à toute personne rationnelle un peu informée. NON ! Ce « non » tranché repose sur un peu de logique élémentaire, en d’autres termes sur du bon sens, et sur un savoir sémantique accessible à tout observateur de la vie publique. La logique et le bon sens disent qu’une ou plusieurs personnes, qu’elles soient ou non universitaires, ne peuvent pas faire que trois choses distinctes soient une seule et même chose.

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L’islamophobie comme concept d’une réalité unique tripartite est donc sans fondement. On a ignoré jusqu’ici, dans notre raisonnement, le fait que « islamophobie » est utilisé par certains de façon plus large encore pour désigner, en plus, toute forme de racisme anti-arabe ou anti-maghrébin. Il va sans dire que s’il est condamnable de brouiller des distinctions utiles en confondant trois phénomènes distincts, il l’est encore plus d’en brouiller un plus grand nombre en en confondant quatre au lieu de trois.

Voilà pourquoi nous pensons qu’il n’y a pas de caution universitaire qui puisse valoir en la matière. Comme une hirondelle ne fait pas le printemps, un universitaire ne fait pas la vérité. Nous recommandons donc plutôt que chacun, en lisant cet article et d’autres, se fasse sa propre opinion sur l’emploi du terme islamophobie dans la vie publique. S’agit-il d’une arme politique utilisée par des militants pour occulter des distinctions essentielles en confondant trois, ou même quatre, choses sous un même vocable, ou s’agit-il d’un concept honnête qui sert à désigner de façon univoque un phénomène bien défini ?

Les signataires de ce texte, membres de Vigilance Universités, sont des universitaires dont la science est l’objet d’étude :

Françoise LONGY, Philosophe des sciences (université de Strasbourg)

Gilles DENIS, Historien et épistémologue de la biologie (université de Lille)

Éric GUICHARD, Philosophe des sciences et des techniques (université de Lyon)

Véronique LE RU, Philosophe des sciences (université de Reims Champagne-Ardenne)

Franck NEVEU, Linguiste et épistémologue des sciences du langage (Sorbonne Université)

Jean-Pierre SCHANDELER, Historien des sciences sociales (CNRS)

Jean SZLAMOWICZ, Linguiste, spécialiste d’analyse du discours (université de Bourgogne)

Marianne



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