Fdesouche

Les polémiques estivales qui ont accompagné l’arrivée des écologistes à la tête des grandes villes (polémiques sur la 5G, refus du Tour de France, comparaison douteuse du maire de Colombes entre les forces de l’ordre et le régime de Vichy ..) ont réveillé les fractures sociales françaises. Sans compromis, elles risquent d’enrayer la marche d’EELV vers le pouvoir, selon Chloé Morin, directrice de l’Observatoire de l’opinion à la Fondation Jean-Jaurès.

Il faut regarder d’où l’on part: EELV n’a jamais vraiment fait figure de parti présidentiable. Sa cote de présidentiabilité reste encore largement à construire. […]

En critiquant le tour de France, en brandissant l’interdiction de la cigarette à Bordeaux, en s’engageant contre les vols low-cost ou pour une fiscalité accrue sur les carburants, les écologistes ne prennent-ils pas le risque de se couper définitivement des classes populaires ?

C’est un risque qui existe. Les nouveaux maires EELV ont été élus dans des zones très urbaines: leur socle électoral est plutôt jeune, plutôt urbain, plutôt éduqué. Donc il y a un sujet. Mais il dépasse largement les écologistes. La manière dont le débat écologique se déploie aujourd’hui réveille les fractures sociales. Et donc le risque, c’est que les classes populaires ne s’y reconnaissent pas. Pour un parti qui se dit de gauche et qui a une vocation sociale, c’est toujours un problème. […]

On l’a vu à Paris avec les militantes Alice Coffin et Raphaëlle Rémy-Leleu, la gauche dite “intersectionnelle” s’est frayée un chemin au sein du mouvement écologiste. Ses objectifs sont-ils compatibles avec la volonté d’EELV d’incarner un parti de gouvernement ?

C’est compliqué parce qu’historiquement à gauche, tous les partis de gouvernement ont été universalistes. Là, on arrive sur des combats qui tranchent non seulement avec la culture de la majorité de la gauche, mais sont par ailleurs directement importés des Etats-Unis, ce que l’on appelle les “identity politics”. Avec cette nouvelle mouvance, émergent des manières de lutter au nom des minorités, contre les discriminations, radicalement différentes de ce qu’a été historiquement le combat pour l’égalité en France. […] Dans l’opinion, ces orientations restent extrêmement minoritaires, car on a un attachement très fort à l’égalité. Si elles ont fait en partie leur chemin auprès des jeunes, je pense qu’elles ne seront pas sans lever des résistances très fortes.

Le nucléaire permet de produire une énergie décarbonée, sans intermittence, à un prix peu élevé. Il offre des garanties face au réchauffement climatique. Pourtant, les écologistes français continuent de s’y opposer violemment. Quelles sont les racines d’un tel dogmatisme ?

C’est une question extrêmement importante. [… D’autant qu’aux arguments écologiques, s’ajouteront ceux économiques percutants auprès du grand public: ce que pèserait l’abandon du nucléaire sur notre compétitivité, sur notre pouvoir d’achat, en quoi cela pourrait conduire à la suppression d’emplois. Si l’on dit demain aux Français qu’ils vont payer l’électricité plus cher alors qu’ils ont déjà des problèmes de pouvoir d’achat, ce sera un vrai problème. On en revient aux classes populaires.

challenges

Fdesouche sur les réseaux sociaux