Fdesouche

[…] La vie sans enfant progresse dans la plupart des pays développés, y compris dans des États européens où les évolutions sociétales ont été très rapides. En Espagne, le taux devrait atteindre 25 % pour les femmes nées en 1975, estiment Albert Esteve et Rocio Trevino, du Centre d’études démographiques espagnol. S’il n’est pas possible de tracer une frontière nette entre les situations subies et celles qui sont choisies (l’anglais distingue les childless et les childfree, les « sans enfant » et les « libres d’enfant »), selon les démographes, l’émancipation tardive en Espagne – 61 % des 18-34 ans vivent chez leurs parents – n’est pas étrangère à cette situation.

« Quantité de facteurs structurels concourent au fait que la maternité devienne une question de choix personnel », souligne la sociologue Anne Gotman, auteure de Pas d’enfant. La volonté de ne pas engendrer. S’appuyant sur les travaux du sociologue allemand Ulrich Beck, elle rappelle que, poussée à son paroxysme, la société de marché est une société sans enfant reposant sur l’individu débarrassé de tout « handicap » relationnel, conjugal ou familial. Et s’il y a une meilleure acceptation sociale de la vie sans enfant, « le phénomène est loin d’être inédit », rappelle-t-elle en évoquant les inquiétudes de Polybe concernant une Grèce antique souffrant d’un « arrêt de la procréation » et d’une « disette d’hommes ».

Plus récemment, au fil du XXe siècle, le taux d’infécondité a épousé une courbe en « U » sur le continent européen. De 20 à 23 % pour les femmes nées entre 1900 et 1915, le taux est tombé progressivement à 10 % pour celles nées au début des années 1940, puis n’a cessé de remonter, relevait une étude de l’Institut national d’études démographiques en 2017. Le démographe Laurent Toulemon avait ainsi pu inversement qualifier la hausse récente de l’infécondité comme « la fin d’une période exceptionnelle pendant laquelle la vie de couple ne se concevait guère sans enfant ». […]

La Croix

Fdesouche sur les réseaux sociaux