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Pour faire face aux problèmes de notre temps et pour éviter les apories de la confrontation entre « conservateurs » et « libéraux », l’essayiste et ancien haut fonctionnaire Pierre de Lauzun entend revenir à la pensée classique.

Le Figaro : Vous vous proposez, dans votre dernier livre, d’effectuer un «grand retournement politique» qui consisterait à réhabiliter la «pensée classique». Pouvez-vous préciser ce que vous entendez par là ? Qu’est-ce que la pensée classique, et à quoi l’opposez-vous ?

Pierre DE LAUZUN.Je pars d’un constat, celui d’une profonde dérive dans nos sociétés. La perte d’éléments essentiels de notre culture et de nos raisons de vivre ensemble. J’en vois la cause dans le relativisme qui domine l’esprit public, relativisme issu d’un paradigme à l’œuvre de façon croissante depuis trois siècles. C’est cette idée que le seul bien que doit reconnaître la société est le droit de chacun à définir comme il l’entend ce qu’il appelle vrai ou bien, sous réserve du droit équivalent du voisin. D’où un individualisme ravageur, qui mine potentiellement les biens communs bâtis patiemment au cours des siècles, qui en outre se contredit en condamnant aujourd’hui ceux qui s’y opposent, au nom du politiquement correct.

L’alternative, c’est la pensée classique, née avec Aristote, Cicéron et Thomas d’Aquin et toujours vivante. Contrairement à l’image qu’on en donne, elle est avant tout pragmatique: elle sait que les sociétés humaines résultent de l’interaction complexe et émotionnelle de personnes libres au cours du temps, et qu’on ne peut les manipuler à volonté à partir de théories abstraites, contradictoires et changeantes. La pensée classique est une immense réflexion sur notre expérience de siècles de vie en commun. Elle est attachée à des principes essentiels comme la recherche du bien et du vrai objectifs, le rôle central de la personne, le besoin pour elle de communautés solidaires et d’une éducation humaniste. C’est cela qui en fait une pensée incarnée, proche de la réalité vécue des gens.

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