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Domenico Lucano, dit “Mimmo”, maire de la ville italienne de Riace poursuivi pour aide à l’immigration illégale, a été banni de sa commune et a dû céder la place à un édile soutenu par l’extrême droite. Reportage dans ce bourg de Calabre, emblème de l’accueil des réfugiés, situé sur la ligne de front d’une Europe divisée sur la question migratoire.

[…] Malgré l’apparente bonne humeur, le coup est rude. “Lucano l’Afghan” – autre surnom, moins affectueux – est soupçonné, sur la base d’écoutes téléphoniques, d’avoir organisé trois “mariages de convenance” entre des résidents de son village et des migrants ; d’aide à l’immigration clandestine, pour avoir délivré avec trop de légèreté des cartes d’identité ; de fraude aux dépens de l’Etat, pour avoir attribué sans appel d’offres, à une coopérative qu’il avait créée, la gestion des ordures du village. […]

Les magistrats ont exclu tout enrichissement personnel, notant d’ailleurs que les éventuels délits auraient été commis “à des fins humanitaires”. Le ministère de l’Intérieur s’est tout de même porté partie civile. […]

Rien ne prédestinait le bourg à devenir le théâtre de ce bras de fer. L’histoire commence il y a tout juste vingt-cinq ans, lorsqu’une bande de rêveurs décident, depuis leur Sud natal, de changer le monde. “On était jeunes, on partageait une idée planétaire d’utopie ­sociale, se souvient Domenico Lucano, alors professeur de chimie. C’était un peu notre 1968 à nous .” […] […] L’horizon a pourtant commencé à s’assombrir quelques mois plus tôt, lorsqu’un rapport de la préfecture décèle des “irrégularités administratives” dans la gestion de l’accueil des migrants. A l’époque où les arrivées de bateaux s’intensifiaient, l’Etat n’hésitait pourtant pas à solliciter Domenico Lucano pour lui demander d’accueillir ces nouveaux arrivants… quitte à transformer le “modèle Riace” en usine. Installées au bord de la mer, en contrebas du bourg, les coopératives chargées de gérer l’aide au titre du système de protection pour demandeurs d’asile et réfugiés – 35 euros quotidiens octroyés à chacun pour se loger, se nourrir et se soigner – étaient prises d’assaut. […]

Le JDD

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