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[…] Les 24 prévenus entrent dans le boxe des accusés sous l’œil des policiers. Beaucoup portent une barbe fournie et un qamis, le long vêtement prisé par les salafistes. Sereins, ils se tiennent par l’épaule et discutent, sourire aux lèvres. Les prévenus sont jugés là pour avoir décapité deux jeunes randonneuses scandinaves, retrouvées mortes dans leur tente le 17 décembre 2018 alors qu’elles campaient près du mont Toubkal, dans le Haut-Atlas. Une attaque filmée qui avait été diffusée dans la foulée sur les réseaux sociaux avec une autre vidéo où les présumés terroristes prêtaient allégeance à l’Etat islamique (EI).

L’interrogatoire commence. A la barre, le premier accusé a des antécédents, condamné à trois ans de prison en 2015 pour « apologie du terrorisme ». C’est d’ailleurs en prison qu’il rencontre Abdessamad Al-Joud, le principal suspect. Lors de l’audience du 30 mai, ce dernier a avoué avoir décapité les deux jeunes randonneuses. […]

Les bras croisés sur la poitrine, Said Taoufik, lui, a confirmé tous les chefs d’inculpation retenus contre lui, dont « apologie du terrorisme » et « constitution d’une bande pour préparer et commettre des actes terroristes ». Dans son qamis bleu gris, il répond par l’affirmative à toutes les questions du juge. « Tu veux continuer le djihad ? », lui demande-t-il. « Oui, bien sûr », répond cet ex-militaire qui a quitté l’armée en 2016. Il avoue que s’il avait eu à l’époque les mêmes convictions qu’aujourd’hui, il aurait commis des attentats à l’intérieur de l’armée grâce aux armes qu’il avait entre les mains. […]

Le groupe des prévenus ne compte qu’un seul étranger. Habillé de son jogging vert, Kevin Zoller Guervos, un Hispano-Suisse de 25 ans, a la mine fatiguée. […] Installé à Marrakech depuis 2015, Kevin est accusé d’avoir participé à la radicalisation des quelques-uns des suspects, bien qu’il clame son innocence. […] Plusieurs détenus qui disent connaître l’Hispano-Suisse. Lors de l’audience du 30 mai, Abdessamad Al-Joud a affirmé que Kevin n’avait jamais parlé de djihad au Maroc, mais plutôt de rejoindre une branche de l’EI aux Philippines.

Les deux hommes se sont rencontrés grâce à Abdelghani Chaabti, qui enseigne dans une école coranique. A la barre, l’homme aux cheveux noirs bouclés affirme au juge que le Suisse priait avec eux. « Je lui ai conseillé de renoncer à son idéologie du djihad — Et il t’a répondu quoi ? — L’inverse », relate-t-il avec un petit rire narquois. […]

Le Monde

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