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A 72 ans, la Canadienne vient d’achever son mandat de représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies pour les migrations. Elle pose un regard inquiet sur le droit international de plus en plus bafoué

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Etes-vous déçue par les démocraties occidentales?

Non, pas seulement. Les démocraties émergentes émettent aussi des signaux inquiétants, qu’il s’agisse des Philippines, du Brésil ou de l’Inde. On y voit l’émergence de populismes de droite qui induisent un repli nationaliste en déconnexion totale avec la réalité des enjeux planétaires tels le changement climatique, la mobilité humaine et le cyberespace.

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Pour la première fois, le monde demandait à l’Europe d’accomplir quelque chose de difficile en approuvant le Pacte mondial sur les migrations. Or jusqu’ici, c’est surtout elle qui avait l’habitude de demander à des pays en voie de développement, en Afrique, de préserver par exemple les droits des LGBT.

Les élections européennes ont montré l’importance de la question migratoire. Avez-vous été déçue par les résistances de certains Etats européens au Pacte mondial sur les migrations?

A l’heure où les enjeux contemporains sont planétaires, oui, c’est difficile à comprendre. A New York, lors des négociations du pacte, le ministre hongrois a explicitement déclaré à plusieurs reprises que la migration est une mauvaise chose, qu’il faut y mettre fin. Pour une Canadienne comme moi, de tels propos étaient ridicules. Les politiques migratoires sont des politiques nationales. Dans certains pays, la migration est une excellente chose: elle permet de compenser des déficits démographiques et de construire des pays […]. De plus, les transferts d’argent effectués par les migrants chez eux représentent jusqu’à 20% du PIB de leur pays d’origine.

L’Allemagne a-t-elle bien fait d’accueillir un million de migrants en 2015 en lien avec la crise syrienne?

Elle en avait besoin et a su les intégrer dans son économie. De plus, il s’agissait de réfugiés. Les pays ont une obligation de les accueillir en vertu de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951. Je l’ai martelé à des diplomates hongrois. En 1956, des réfugiés hongrois étaient venus chercher refuge au Canada. En Europe, on a parlé de crise migratoire avec 2 millions de réfugiés. Dans un ensemble qui représente 500 millions d’habitants, c’était une crise de gestion et non migratoire, une crise intra-européenne due à un manque de solidarité des Etats membres de l’UE…

 

Le Temps

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