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Ancien sénateur socialiste, Henri Weber fut l’un des fondateurs de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) et un leader de Mai-68. Auteur de “Rebelle jeunesse” (éditions Robert Laffont, 2018), il observe une “osmose” entre “Gilets jaunes pacifiques” et “méchants casseurs”.

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La violence n’était-elle pas aussi présente en 1968?

Les manifestations étaient violentes mais sur le plan strictement politique, dans l’affrontement avec les forces de l’ordre. […] Or, actuellement, il n’y a pas d’un côté les pacifiques Gilets jaunes et de l’autre les méchants casseurs, mais bien une osmose. Parmi les auteurs des violences, il y a des groupes d’extrême droite et d’extrême gauche, et des pillards, mais aussi un gros volant de Gilets jaunes pour qui casser, c’est la seule façon de se faire entendre.

La différence avec 1968, c’est que les Gilets jaunes ne rêvent pas à des lendemains qui chantent…

Mai 68, c’était un grand mouvement de démocratisation et de libéralisation de la société, mais aussi de conquêtes sociales. Ses forces motrices étaient la jeunesse étudiante et la classe ouvrière, alors au sommet de sa puissance. Ce mouvement était porteur d’un projet de société, d’une alternative positive à l’ordre existant. C’est la grande différence avec le mouvement des Gilets jaunes, qui est hétérogène : il a une composante de gauche et même d’extrême gauche, mais sa dominante, c’est un populisme de droite, antifiscaliste, antiétatique, antiélites, autoritaire, complotiste. Il n’est porteur d’aucun projet d’avenir un peu cohérent. Les 42 revendications sorties des échanges sur le Net, c’est un ensemble de propositions souvent contradictoires. […]

À vos yeux, quel est le niveau d’implication de l’extrême droite?

Jusqu’ici, le FN, aujourd’hui RN, agissait principalement dans les urnes, accessoirement dans les médias et les meetings, mais n’était pas une force qui tenait la rue, contrairement aux forces de gauche, qui s’appuyaient sur les partis et les syndicats. Mais aujourd’hui, en chevauchant ce mouvement, les petits groupes d’extrême droite et le RN ont pris des positions dans la rue, les places, les ronds-points. Il y a une affinité élective entre l’extrême colère des Gilets jaunes et l’idéologie de l’extrême droite, son antiélitisme et son rejet de la démocratie représentative. Même si tous les Gilets jaunes ne sont pas sur cette orientation. […]

Le JDD

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