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Charmed, Buffy, Sabrina l’apprentie sorcière… Un violent vent de nostalgie souffle sur les chaînes américaines. Des reboots de ces séries sont soit sur le point de débarquer sur nos écrans, soit en projet, et on nous les vend comme plus féministes et plus intersectionnels que jamais. Faut-il se réjouir de ce sursaut post-#MeToo ou déplorer une certaine paresse? Retour sur une tendance qui n’a pas fini de se développer.

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Les chaînes de télé auraient-elles décidé de nous faire retomber en adolescence? “Tout le monde dans le business sait que la nostalgie fait vendre”, nous explique Kathleen Loock, docteure de l’université libre de Berlin qui s’est penchée sur la question des reboots et des revivals pour la revue Television & New Media.
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Et justement, le contexte politique est devenu le centre de ces projets. L’un des points communs entre les reboots de Charmed et des Nouvelles aventures de Sabrina est sans conteste le positionnement féministe, qui se veut beaucoup plus clair que dans les années 90. “Charmed appartient à une tradition dont la recette est de vouloir plaire aux spectateurs ayant des sensibilités féministes tout en essayant d’attirer ceux qui souhaitent voir des femmes sexy”, nous explique Anne Sweet, autrice d’une thèse sur le Girl Power dans les séries américaines. Même si la série originale mettait en scène trois jeunes femmes dans un univers télévisuel majoritairement masculin, les scénarios restaient assez conservateurs, faisant la promotion de valeurs plutôt traditionnelles. “Les femmes d’action n’apparaissent pas comme trop puissantes afin de ne pas déplaire aux adhérents des discours sociaux hégémoniques”, conclut Anne Sweet. Un Charmed version 2018 permettrait donc de corriger un positionnement considéré aujourd’hui comme un peu tiède ou problématique. Il suffit de voir la liste des articles qui reprochent aujourd’hui l’objectification des trois jeunes sorcières pour comprendre que la marge de progression est importante.

Au Comic-Con de San Diego en juillet dernier, Jennie Snyder, showrunneuse de Jane the Virgin et productrice de ce Charmed nouvelle génération a voulu ménager les ancien·ne·s fans et les actrices historiques. “La version originale (NDLR: diffusée de 1998 à 2006 sur The WB) parlait déjà de la prise de pouvoir des femmes et de sororité, a-t-elle expliqué à l’époque. Je trouve que c’est exactement ce dont nous avons besoin actuellement.” Pour elle, il est important que la série, qui surfe aussi sur la popularité grandissante des sorcières auprès des féministes, parle de son époque. Elle promet donc des arcs narratifs sur la présidence de Trump, les mouvements #MeToo et Time’s Up ainsi qu’une bonne représentation LGBTQ+. Au casting, on trouve aussi trois actrice racisées, qui ont expliqué l’importance pour elles de se voir représentées à la télévision.

Même promesse pour Les Nouvelles aventures de Sabrina. L’actrice principale Kiernan Shipka (Sally Draper dans Mad Men) a encouragé le showrunner Roberto Aguirre-Sacasa à ancrer sa série dans le présent en poussant le message féministe de son héroïne. La jeune sorcière utilisera donc son temps libre pour monter un club féministe intersectionnel et s’inquiètera de savoir si Satan n’est pas une énième figure patriarcale. “Ces reboots interviennent à un moment où le féminisme est très à la mode”, explique Kathleen Loock. Ce n’est pas une surprise que ces séries avec des personnages principaux féminins soient sur la liste. Dans l’environnement actuel marqué par la culture médiatique postféministe, par les célébrités féministes, par le mouvement #MeToo et l’activisme, ces séries auront un sens nouveau. Elles peuvent parler des débats actuels tout en nous montrant ce qui a changé depuis les années 90.”

“En ajoutant de la diversité à la distribution, les séries ne changent pas automatiquement leur vision blanche du monde.”

Les reboots visent aussi à se débarrasser de leurs castings composés d’une majorité d’acteurs et actrices blanches. Pour le projet autour de Buffy, qui devrait se concentrer sur une autre tueuse de vampire du même univers, la showrunneuse Monica Owusu-Breen a évoqué l’idée d’une héroïne noire. Les castings de Charmed et Sabrina suivent la même tendance en intégrant bien plus de diversité que les originales. Plus féministe, plus woke, plus inclusives: les chaînes de télé ont-elles vraiment décidé d’entrer dans une nouvelle ère? La question est loin de faire l’unanimité. Dans un texte paru sur Slash Film, la journaliste Candice Frederick a exprimé son agacement sur le simple “remplacement” d’un acteur blanc par un acteur noir. “Dans Buffy, Joss Whedon a eu sept saisons pour donner corps à un féminisme intersectionnel et pour ajouter un personnage noir complexe, badass et qui serait resté plusieurs saisons, écrit-elle. Utiliser ce reboot pour essayer de corriger cela, c’est un peu paresseux.” Au lieu de rectifier le tir sur des séries existantes, il serait plus efficace d’inventer de nouvelles histoires pour remplacer ce “white gaze” omniprésent à la télévision. “Même si leurs histoires sont considérées comme universelles, elles sont perçues comme blanches par leur casting et leur esthétique, nous explique Candice Frederick. Quand on regarde des remakes tournés avec des acteurs noirs, il est difficile de séparer cette nouvelle histoire de ses origines blanches.” Kathleen Loock nous cite à son tour un argument similaire issu du livre The Cultural Politics of Colorblind TV Casting de Kristen Warner. “Cette autrice a montré que le casting des acteurs racisés s’accompagne d’un idéalisme”, nous explique Loock. “En ajoutant de la diversité à la distribution, les séries ne changent pas automatiquement leur vision blanche du monde.”

Ces reboots ne sont-ils qu’un écran de fumée empêchant l’émergence de voix singulières qui proposeraient des histoires originales et politiques? On peut tout de même noter qu’à l’exception de Sabrina, la plupart de ces remakes ont été placés entre les mains de femmes, qui s’occupent de la production et du scénario. Faisons leur confiance et voyons si elles réussissent, dans de vieux chaudrons, à nous raconter de nouvelles histoires.

Cheek Magazine


Cheap mais engagé, le reboot de Charmed est une bonne surprise

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À l’inverse, son reboot [de Charmed] s’ancre au maximum dans notre contexte contemporain, soit une ère post-Weinstein, et le fait avec absolument aucune subtilité. Le personnage de Mel, une activiste féministe et ouvertement lesbienne, proteste pour placer un agresseur sexuel présumé sous les verrous tout en rappelant à de jeunes étudiant·e·s l’importance du consentement. Là où certaines séries sont féministes sans pour autant s’autoproclamer comme tel, ce Charmed de 2018 prend le contre-pied, en fait des tonnes et s’impose comme une incarnation du Féminisme pour les nuls. Oui, c’est un peu redondant par moments, mais nécessaire et bienvenu quand on connaît la cible jeune du network sur lequel est diffusée la série.

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Dans le pilote, nos nouvelles sorcières doivent faire face à un démon qui se nourrit des âmes des jeunes femmes – une belle métaphore sur les prédateurs sexuels affichés grâce à #MeToo – et qui prend l’apparence d’un Marcheur blanc façon Game of Thrones…
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On sent la volonté de Jennie Snyder Urman (Jane the Virgin), la showrunneuse, de faire de ce reboot une version progressiste de la série mère, avec un propos féministe et beaucoup de légèreté dans son approche. C’est un peu bancal dans l’ensemble mais le visionnage de ce pilote était mine de rien plaisant, en dépit des effets spéciaux risibles qui piquent les yeux.
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Biiinge Konbini


Les glaçantes aventures de Sabrina et ses thèmes féministes

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“C’est la Sabrina de 2018, à bien des égards. C’est une sorcière éveillée [NdeFDS: en anglais “Woke” sous-entend conscient(e) de la réalité des problématiques féministes et intersectionnelles],” dit Shipka à Variety. “Toute sa lutte pour retirer son nom du Livre de la Bête, la remise en question de nombreux éléments parmi les plus patriarcaux de ce qu’on lui a appris à croire et à suivre. Je pense que c’est en soi très féministe et que c’est une femme forte et indépendante qui se défend et fait ce qu’elle pense être juste.”

Lachlan Watson, qui joue Susie, l’amie de Sabrina, a dit que le féminisme de la série va plus loin dans intersectionnalité, qui montre que tout le monde peut être féministe. Susie est non-binaire, comme Watson elle-même, et leur expérience avec les harceleurs à Baxter High fait partie de leur voyage vers leur authentique identité, dit Watson.

“Susie montre un aspect du féminisme qui démontre qu’il n’est pas nécessaire d’être une femme pour être féministe. Elle englobe vraiment toutes les minorités et toutes les personnes incomprises, ou l’inégalité entre les sexes dans son ensemble, je pense”, ont-ils dit. “Tout au long du parcours de Susie (une sorte de voyage initiatique genderqueer) ce qui me parle vraiment, c’est qu’il y ait ce groupe d’incroyables féministes derrière elles.”

L’émission s’est efforcée de promouvoir la diversité et l’inclusion sur le plateau et en dehors. Watson a dit qu’ils ont été “acceptés à bras ouverts” par les acteurs et l’équipe de création, et qu’ils ont été autorisés à être eux-mêmes sans s’excuser et être “un peu différents et un peu bizarres”.
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Variety


Plus féministe, plus inclusive : «Ma sorcière bien-aimée» est de retour

Après l’annonce du reboot de « Buffy Contre les Vampires » avec une actrice noire dans le rôle de Buffy, c’est au tour de « Ma sorcière bien-aimée » de revenir sur nos écrans façon 2018.

Le producteur Kenya Barris a imaginé un reboot plus inclusif pour le retour de Samantha Stephens et de ses pouvoirs magiques. « Samantha, mère célibataire, noire et bosseuse, épouse un mortel blanc nommé Darren qui se trouve être un peu fainéant. Ils auront ainsi du mal à faire avec leurs différences alors qu’elle découvre que, même lorsqu’une femme noire est littéralement magique, elle n’est toujours pas aussi puissante qu’un homme blanc, grand et bien coiffé, aux États-Unis » rapporte le créateur de la série(…)

Ce remake moderne tentera de bousculer les codes par rapport à la série d’origine et sera une critique de la société américaine.(…)

Soirmag


[Charmed]
Accusations de colorisme

Bien que la série fut louée pour sa diversité en présentant trois femmes de couleur dans les rôles principaux, elle a également été critiquée pour avoir fait une grande place aux Latino-Américains alors qu’un seul des rôles principaux s’identifie comme Latina. Mantock, qui a appris l’espagnol pour ce rôle, a déclaré : “Je suis ouverte avec les auteurs et essaie de respecter les gens, car je suis afrocaribéenne. Je ne suis pas Afro-Latine et je veux faire cette enquête parce que Mélanie[Diaz] est en fait la seule personne dans la vraie vie qui soit Latina.” Je sais que nous représentons la communauté latino-américaine. En fait, je suis afro-américaine. Je ne suis pas latino, ce qui est une idée fausse courante.” Samantha Chavarria estime que ” les dernières révélations concernant l’origine ethnique des acteurs mettent en évidence le fait très réel que dans leurs efforts pour promouvoir un redémarrage, les CW ont utilisé le colorisme et l’exploitation pour susciter notre enthousiasme et notre intérêt.”

La page wikipédia en anglais de Charmed 2018


TL, DR : résumé en deux tweets de l’épisode 1 de Charmed par une twitelle

https://twitter.com/acqua_di_mare/status/1052048155724910592


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