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Présidente du Cercle droit et débat public, Noëlle Lenoir, ancienne ministre de Jacques Chirac et ancienne membre du Conseil constitutionnel, estime que la « provocation publique à la commission d’un crime ou d’un délit », qualification retenue par le parquet de Paris à l’encontre du rappeur Nick Conrad, auteur de chanson accompagnée d’un clip « Pendez les Blancs » , ne va pas assez loin. Et que celui-ci doit être poursuivi pour racisme.

Voici la tribune de Noëlle Lenoir :

Imaginons qu’un groupe de rockers à la peau blanche diffuse un clip intitulé « Pendez les Noirs », s’ouvrant sur l’image d’un homme à la peau noire ensanglanté au bout d’une corde, et rythmé par ces paroles : Je rentre dans des crèches, je tue des bébés noirs, attrapez-les vite et pendez leurs parents, écartelez-les pour passer le temps, divertir les enfants blancs de tout âge petits et grands. Fouettez-les fort faites-le franchement, que ça pue la mort que ça pisse le sang et ainsi de suite…

S’interrogerait-on un instant sur le caractère raciste de cette exhortation ? Hésiterait-on sur l’applicabilité des dispositions de l’article 24 de la loi du 1881 punissant ceux qui « provoquent à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une race » ? Ou sur l’applicabilité du cinquième alinéa du même article réprimant l’apologie des atteintes volontaires à la vie et des atteintes volontaires à l’intégrité de la personne (ici avec circonstance aggravante de racisme conformément à l’article 132-76 du Code pénal) ? Ou des dispositions du Code pénal sur l’apologie du terrorisme (article 421-2-5) ou de l’article sur l’incitation à s’armer contre une partie de la population (article 412-8), là encore avec circonstance aggravante de racisme ? Disserterait-on sur la distinction à faire entre les débordements des paroles d’une chanson et un appel au meurtre ? Minimiserait-on cet appel en relevant que ce groupe de rock n’avait jusqu’alors qu’une faible audience ? Prétendrait-on que l’écho fait à un tel clip est idéologiquement orienté ? Qu’exprimer sa frayeur et son dégoût reviendrait à stigmatiser injustement les hommes et les femmes qui ont la peau blanche ?

Répondre par un non ferme et énergique à ces questions va de soi aux juristes et analystes que nous sommes. Pourquoi n’est-ce pas la réaction unanime ? Pourquoi tente-t-on de nous faire avaler que le clip de Nick Conrad rappellerait les chansons de Brassens ? Qu’il serait une revanche contre « les hommes blancs et éduqués qui ont le pouvoir de tout dire » ? Ou encore que ce clip mériterait « une distanciation grâce à l’art » (sic !) ? Non, les « hommes blancs et éduqués » n’ont pas le pouvoir de tout dire. Nous sommes tous tenus de respecter le droit. Il doit être clair pour tous, ainsi que l’énonce l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, que « la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». Enfin, quel art – si art il y a dans ce clip – pourrait justifier l’impunité de celui qui appelle à tuer des enfants parce qu’ils ont la peau blanche ? (…)

En racialisant la réprobation et la répression, on institutionnaliserait un « deux poids deux mesures » qui, pour être du racisme à rebours, n’en serait pas moins du racisme et se rendrait en l’occurrence complice d’une épouvantable invitation à tuer.

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