Fdesouche

22/07/2018

(…)

C’est alors que, selon la retranscription de la bande sur procès-verbal, Arnaud Beltrame pousse ce qui sera ses derniers mots : « Attaque… Assaut, assaut ». Il est ensuite fait mention de « bruits de lutte et cris d’une ou deux personnes ». Le négociateur ne semble pas prendre la mesure de la situation. « Qu’est-ce qu’il se passe ? », répète-t-il à trois reprises. S’ensuit un très long monologue où ses questions demeurent toutes sans réponse : « Radouane, je veux savoir ce qui se passe […] tous ces bruits donnent l’impression que vous êtes bien énervé […] Arnaud, vous êtes là ? ». À cinq reprises, le procès-verbal fait état de « bruit de râle ». Arnaud Beltrame, dont on apprendra ensuite qu’il a été égorgé, est en train d’agoniser mais le négociateur ne semble pas réaliser. « Si tu es blessé, Arnaud, grogne un coup… C’est toi, Radouane, tout ce bruit ? », questionne inlassablement le gendarme. « La retranscription ne rend pas compte de la situation extrêmement confuse au moment des faits, insiste une source proche du dossier. Ce qu’on identifie après coup comme des râles n’a pas forcément été perçu comme tel dans le feu et le bruit de l’action. »

Combien de temps dure cette séquence avant que les effectifs locaux du GIGN ne donnent finalement l’assaut, après avoir entendu trois coups de feu dans la pièce ? Dans le passage du rapport de synthèse du GIGN remis à la justice correspondant à cet appel téléphonique, il est fait état d’un « brouhaha […] pendant trente secondes » entre l’interruption brutale de la conversation et les coups de feu. Or, comme nous l’avions révélé en avril, selon plusieurs sources, le délai entre les ultimes paroles de l’officier et l’assaut avoisine plutôt les 10 minutes. Le procès-verbal de la bande-son ne permet pas de donner un minutage précis, puisqu’il n’est pas horodaté. Mais il est évident que de longues minutes s’écoulent. Contactée, la direction générale de la gendarmerie n’a pas souhaité faire de commentaire sur une affaire judiciaire en cours.

Le Parisien

Merci Neuneu


15/04/2018 Attentats dans l’Aude : révélations sur l’assaut du Super U de Trèbes ( 11 )

Des enregistrements mettent en évidence un délai de dix minutes entre le signal de l’assaut lancé via un portable par Arnaud Beltrame et l’intervention des gendarmes dans le Super U.

Trois semaines après les attentats dans l’Aude, l’enquête judiciaire permet de retracer les quatre heures d’un huis clos dramatique au Super U de Trèbes. Mais pas de lever tous les mystères. Y a-t-il eu dysfonctionnement ? Le minutage réalisé à partir de l’enregistrement des échanges avec le preneur d’otages a révélé, en effet, un délai d’un peu plus de dix minutes entre la tentative du lieutenant-colonel Beltrame pour désarmer le djihadiste et le déclenchement de l’intervention menée par l’antenne locale du GIGN.

(…)

À 11h28, Beltrame propose au terroriste de se substituer à l’employée et pénètre à son tour dans la pièce. Initiative personnelle qui suscite un moment de tension à la cellule de crise activée à la direction générale de la gendarmerie, à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine). Le lieutenant-colonel a pris soin au préalable de déboucler son ceinturon, déposant son pistolet Sig Sauer 9 mm à l’extérieur de la salle.

L’officier, qui ne porte aucun gilet pare-balles, a la présence d’esprit de laisser son téléphone portable allumé, ce qui permet d’obtenir une sonorisation de la pièce, en plus des moyens de surveillance déployés par les unités d’intervention. Pour sa part, Lakdim est armé d’un 7,65 mm d’un modèle ancien et assez peu répandu.

(…)

À 13h10, Radouane Lakdim sort brièvement de la salle des coffres tenant son otage sous la menace de son arme et menace de « tout faire sauter ». Puis se retire, après avoir récupéré un chargeur de téléphone près des caisses. Le général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie, ne veut pas laisser passer une nouvelle occasion de neutraliser le terroriste. C’est pourquoi il donne l’ordre aux tireurs de précision de profiter de la moindre opportunité.

Les hélicos du GIGN sont encore à plusieurs dizaines de minutes de vol de Trèbes lorsque tout bascule. À 14h16, le lieutenant-colonel Beltrame tente de désarmer le terroriste. Sur la bande, on entend confusément « Assaut assaut ! ». Puis trois coups de feu.

Selon nos informations, l’intervention menée par une colonne de neuf hommes, qui permet de neutraliser Radouane Lakdim, a lieu plus de dix minutes plus tard. Des sources concordantes indiquent pourtant que le rapport d’intervention transmis à la justice ne mentionne pas ce délai.

Interrogée sur les conditions de l’assaut, la direction générale de la gendarmerie refuse de commenter, arguant du fait qu’une enquête judiciaire est en cours. « Il était nécessaire de localiser et évaluer les piégeages avant de les neutraliser », fait cependant valoir une source proche du dossier pour expliquer ce décalage dans le temps. Trois charges artisanales ont bien été retrouvées dans le magasin.

L’arme de Lakdim, qui avait tiré toutes ses munitions, a été retrouvée sur place, de même que le 9 mm du lieutenant-colonel. L’hypothèse la plus vraisemblable est que le terroriste ait récupéré ce pistolet déposé par l’officier à l’extérieur de la salle des coffres. L’autopsie a montré qu’Arnaud Beltrame est décédé des suites d’un coup de poignard porté au niveau de la trachée. Il avait par ailleurs des blessures par balles, non mortelles, au pied et au bras.

Le Parisien

Fdesouche sur les réseaux sociaux