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Des milliers de Syriens, Afghans ou Africains continuent de converger vers la Bosnie pour tenter de passer en Croatie, puis en Europe. Leur voyage dure parfois depuis plus d’un an, de quoi devenir fou.

Les voitures sont rares sur les routes de la Lika, une région de l’est de la Croatie autrefois siège des séparatistes serbes de Krajina. Les villages désertés portent encore les traces des combats de l’été 1995, mais des fourgonnettes de la police patrouillent dans les collines. «Les clandestins marchent la nuit, en se cachant comme des bêtes sauvages», lâche le patron d’un hôtel situé sur la route nationale qui file vers la côte Adriatique.[…]

Hidjam et ses amis viennent de Lahore au Pakistan, ils ont installé leur campement au deuxième étage de l’ancien pensionnat, déployant des couvertures sur le béton nu. Après les pluies des derniers jours, des gouttes d’eau s’écoulent du plafond. «Nous avons essayé deux fois de passer en Croatie, mais nous nous sommes fait prendre. Est-ce vrai que l’Espagne accepte les réfugiés?» demande le jeune homme. Des gamins syriens ou afghans courent dans les escaliers, interpellant les volontaires locaux en serbo-croate: beaucoup ont séjourné de longs mois en Serbie, avant de prendre la route de la Bosnie, espérant trouver un passage vers l’Europe occidentale. «Les réfugiés ont commencé à arriver en avril et ils sont chaque jour plus nombreux», reconnaît Selam Midzic. «Nous ne pourrons pas tenir bien longtemps si les frontières de la Croatie demeurent fermées.»[…]

Un policier surveille placidement la foule, écartant les resquilleurs. «Le monde entier s’est donné rendez-vous ici: il y a des Syriens, des Pakistanais, des Africains, et même des gens de Donetsk, en Ukraine. La Bosnie ne peut pas nourrir tous ces gens et personne ne nous aide. Tout le monde a certainement oublié où se trouvait notre pays.» […]

Adil, un grand gaillard algérien de 26 ans, originaire de Batna, prend le soleil avec un compatriote et deux autres compagnons d’infortune venus de Tunisie et de Libye. Les jeunes gens sont en route depuis plus d’un an. Mustafa le Libyen a le bras marqué d’une profonde entaille. Le 16 juin, il se trouvait dans un squat de la ville quand une violente bagarre a éclaté: un Marocain a été poignardé à mort sous ses yeux par un autre migrant, probablement sous l’emprise de l’alcool ou de la drogue. «La plupart des gens sont calmes, mais certains deviennent fous après une si longue route», explique Adil.[…]

Le Temps

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