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Des départs de feu chroniques, des agressions de professeurs, d’élèves, des menaces de mort, des armes en circulation et des filles priées de raser les murs… Voilà l’invraisemblable quotidien du lycée Gallieni, à Toulouse.

C’était juste avant les vacances de Noël 2017. Au lycée polyvalent Joseph-Gallieni, à Toulouse, où les violences font partie du quotidien, la tension était encore montée d’un cran. Une baston généralisée avait éclaté en cours d’espagnol. “Un gamin, à bout, a flanqué son poing dans la figure d’un des perturbateurs qui l’empêchaient de travailler depuis le début de l’année, raconte Fanny Guichard, professeur de physique-chimie. Ils lui sont tous tombés dessus.”

Une semaine plus tôt, c’était le proviseur qui était jeté de la cafétéria à coups de canettes pour avoir voulu éteindre un début d’incendie. “Là, on s’est dit ce n’est plus possible. S’ils s’en prennent même à la plus haute autorité de l’école, on est foutus!”

“A Gallieni, la République a mis un genou à terre, martèle Mathieu Perion, professeur de génie mécanique et correspondant local du SNUEP-FSU. Nous lançons un cri d’alarme. Il faut sauver notre lycée. Il y a urgence! Si on ne fait rien, on va compter les morts!” Les mots sont forts, les phrases chocs, le débit rapide, les yeux rougis par la fatigue. Les exactions que tous décrivent tour à tour sont essentiellement commises par une centaine d’élèves totalement ingérables, expliquent-ils.

Les faits qu’ils relatent avec force précisions et détails sont impensables, inimaginables, inacceptables dans une école de la République. Mais face à cela, l’administration temporise. “Nous prenons très au sérieux le ressenti des professeurs (sic!)”, nous a-t-on rétorqué à l’académie de Toulouse. Des armes? “Pas à notre connaissance.”

Et pourtant… Un rapport interne du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail académique (CHSCTA), que L’Express a pu se procurer en exclusivité, contredit totalement la version officielle. Il évoque “des élèves en possession d’armes”, “une agression d’un fils sur sa mère en fin de réunion parents-profs”, “une somme de 50000 euros budgétée pour les dégradations depuis septembre 2017”, “95% des personnes interrogées disant avoir subi des violences”, “un curseur de l’inacceptable sans cesse à la hausse”…

“Ne jouons pas sur les mots! s’écrie Mathieu Perion. Le rectorat nous parle d’élèves ‘difficiles’, mais, pour nous, il s’agit bien de délinquants, en garde à vue ou pourchassés par la BAC le week-end mais envoyés chez nous la semaine. Comme si, dans l’enceinte du lycée, nous n’avions par miracle plus affaire aux mêmes jeunes!” Toujours d’après le rapport du CHSCTA, de 60 à 80 élèves seraient “en suivi judiciaire”, l’un d’entre eux “en attente de comparution devant la cour d’assises”, et certains “interdits de séjour sur Paris”, donc placés ici dans le cadre de mesure d’éloignement.

La scolarité de certains serait parfois interrompue par des séjours en prison. “On les voit partir puis revenir… Quand ils réintègrent le lycée, ils sont parfois perçus comme des héros ou des exemples à suivre”, poursuit un prof. Peu à peu, les codes de la cité se sont reproduits dans les couloirs. Les trafics de drogue, les liasses de billets qui circulent, les rackets et les menaces diverses. “La semaine dernière, l’un d’eux m’a dit: ‘Combien tu veux que je te donne pour que tu nous foutes la paix?'”, affirme encore un enseignant.

On soupçonne également la présence de quelques cas de radicalisation ou de candidats au djihad. “Ce type d’information ne nous a pas été remonté”, répond Xavier Le Gall, secrétaire général de l’académie de Toulouse.

L’année dernière, pourtant, la section des conducteurs routiers a modifié sa politique d’admission -juste après l’attentat de Nice- pour revenir à un recrutement sur dossier. “On s’est battus pour ça, insiste Mathieu Perion. Quand vous avez un jeune qui roule à 80 kilomètres à l’heure sur la rocade en balançant, en riant: ‘Et là, si je tournais le volant d’un coup, qu’est-ce que ça ferait?’, franchement, vous avez froid dans le dos!” Selon certains profs, pas de doute: le changement du dispositif est dû à des mesures évidentes de sécurité, quand l’Académie, elle, met en avant “un seul souci de mixité sociale”.

Les 97 filles de l’établissement, une petite minorité, font partie des “cibles” les plus à risques. “Les plus jolies sont victimes d’attouchements, les moins jolies subissent des insultes. Le mieux est d’être la plus transparente possible et de se fondre dans le décor”, explique Virginie Sénoville, professeur de lettres et d’histoire-géo.

Anaïs*, 16 ans, crie sa révolte: “Même si c’est compliqué, je mets un point d’honneur à me maquiller, à rester féminine. Mais on me traite de ‘salope’ et de ‘pute’ en permanence, même devant les profs.” L’année dernière, lorsqu’elle était en seconde, elle a subi une tentative d’agression sexuelle. Trois garçons, qui s’étaient procuré le code des toilettes des filles, lui ont sauté dessus et l’ont plaquée contre le mur. “J’ai réussi à me dégager et à m’enfuir. Depuis, comme les autres filles, je ne m’y rends plus toute seule.”

Le collectif d’enseignants de Gallieni se dit, en revanche, totalement incompris par les instances locales de l’Education nationale. “Quand on évoque nos besoins de sécurité et nos missions de formation pour tous, eux parlent de ‘méthodes pédagogiques à revoir’!” insiste Fabien Bergès. Mercredi dernier, Jacques Caillaut, directeur académique des services de l’Education nationale (Dasen), venu assister à une réunion, a été accueilli sous les huées d’une partie du corps enseignant. (…)

A la fachosphère qui tente de récupérer le mouvement à coups de posts sur le Web “à vomir”, et aux bien-pensants qui les accuseraient de faire le jeu des extrêmes en stigmatisant les élèves, leur réponse est claire:

L’Express

Merci à valdorf

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