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Depuis sa démission, en juillet, l’ancien chef d’état-major des armées avait respecté une stricte réserve. Il s’explique aujourd’hui dans un livre, dont « Le Monde » publie des extraits en exclusivité.

18th Chairman of the Joint Chiefs of Staff Army Gen. Martin E. Dempsey and French Chief of Defense Staff Gen. Pierre de Villiers salute in front of the Pentagon during an honor cordon in Arlington, Va., April 23, 2014. DoD photo by Mass Communication Specialist 1st Class Daniel Hinton

D’abord, je l’ai écrit dans mon communiqué, je considérais, à l’issue des arbitrages budgétaires pour la gestion du budget 2017 et la construction du projet de loi de finances 2018, ne plus être en mesure d’assurer la pérennité du modèle d’armée auquel je croyais pour garantir la protection de la France et des Français, aujourd’hui et demain. (…) Ensuite, après avoir entendu les propos du président de la République, le 13 juillet au soir, j’ai estimé en conscience que le lien de confiance entre le chef des armées et son chef d’état-major était trop dégradé pour que je puisse continuer dans mon poste. Critiqué publiquement et explicitement, devant les représentations étrangères, dont mon homologue américain présent à mes côtés pour notre fête nationale, devant les familles des soldats morts au combat au cours de l’année, devant les blessés des armées et l’ensemble des représentants de la communauté de défense, il me semblait impossible de poursuivre ma mission.

(…) Les combats actuels, où qu’ils aient lieu, sont systématiquement intenses et nécessitent, à des degrés divers, l’engagement de tous les équipements utiles au combat (…) dans tous les milieux. Les centaines de blessés aujourd’hui en opération, physiques ou post-traumatiques, nous obligent : nous ne pouvons plus traiter des problèmes de défense avec une approche comptable comme nous l’avons connue dans les années 2000. Il y va de la vie ou de la survie de nos soldats, marins ou aviateurs. Le niveau de violence de nos adversaires l’exige.
(…) Nous n’en sommes plus aux interventions ponctuelles dans l’espace et dans le temps. La phase militaire de la majorité des engagements extérieurs dure en moyenne une quinzaine d’années. La difficulté que l’on rencontre à instaurer des stratégies de paix laisse craindre le développement du phénomène de « pourrissement » des conflits.

(…) La conflictualité contemporaine crée de l’ambiguïté à tous les niveaux dans la désignation de l’ennemi, l’évaluation de la menace, l’appréciation de la situation, les objectifs à poursuivre, le choix des moyens. Les rapports entre le pouvoir politique, seul décideur en dernier recours, et l’état-major s’en trouvent modifiés (…) Le politique se trouve soumis à des pressions, des urgences venant de toutes parts, un calendrier marqué par des échéances à court et moyen termes. Le militaire est centré sur la force armée, il sait que des opérations durent souvent au-delà d’un quinquennat et que leurs conséquences s’inscrivent dans le long terme.

(…) C’est en demeurant chacun dans sa sphère de compétences que l’on trouve les meilleures solutions, que l’échange est le plus fructueux. Restant, face à mes interlocuteurs politiques, le soldat que je suis, j’ai toujours su que nos différences pourraient devenir des désaccords et que je ne saurais avoir le dernier mot face au représentant de la nation.

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Merci à valdorf

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